Le mot de l’AFC-UNHPC
Les évolutions récentes majeures portent sur la chirurgie, avec l’émergence des prises en charge en ambulatoire.
En ce mois d’octobre, nombre d’entre vous sont en cours de bouclage de leur dossier de demande de participation à un appel à projets INCa – DGOS sur la chirurgie ambulatoire des cancers.
Pour le cancer du sein, les plus petites tumeurs sont les plus concernées, et de plus en plus nombreuses grâce au dépistage. Mais certaines équipes ont déjà une grande expérience de la prise en charge des mastectomies totales en ambulatoire.
Pour les femmes qui viennent d’apprendre leur diagnostic, et sont donc au début de leur traitement, ce retour précoce au domicile peut parfois être porteur d’angoisse. Le sentiment commun en « ambulatoire, ce n’est pas grave », vient heurter des personnes qui sont fragilisées par l’assimilation du diagnostic et ses conséquences.
C’est en cela que l’accompagnement avant l’intervention est primordial. Tout d’abord, il est nécessaire de disposer de l’information sur la technique opératoire, les soins à réaliser au domicile. Les complications possibles doivent être expliquées par le chirurgien, l’anesthésiste, puis sont reprises par l’infirmière du dispositif d’annonce. Une bonne organisation et des relations de confiance préalablement établies avec les équipes de ville – médecin traitant, infirmières libérales – sont essentielles. Ces professionnels de santé connaissent le suivi à réaliser et peuvent être disponibles pour répondre aux besoins des femmes. La possibilité de joindre l’équipe chirurgicale par téléphone est presque systématiquement proposée aux patientes, avec bien entendu des consultations de suivi programmées dès le jour de l’intervention. L’équipe de soins de support est également mise à contribution avec les onco-psychologues, les assistantes sociales, les kinésithérapeutes, etc.
Mais au final, ce moment d’angoisse préopératoire est vite oublié. Les femmes qui retrouvent très vite leur domicile se sentent moins médicalisées et la plupart d’entre elles sont totalement satisfaites.
Il est encore trop tôt pour connaître les différences de taux de complications post-opératoires entre hospitalisation classique et ambulatoire pour la chirurgie carcinologique du sein, mais assurément, les bienfaits d’un retour précoce au domicile ne devraient que pouvoir être démontrés.
Dr Anne Mallet
Secrétaire national de l’AFC-UNHPC
Pour Octobre Rose, vous ne manquez pas d’idées !
Porter un autre regard sur la maladie, Groupe Courlancy, Reims
Le Groupe Courlancy, engagé depuis des années dans Octobre Rose, sous l’impulsion de son Président, le Dr Jean-Louis Desphieux, s’est orienté vers l’art, excellent vecteur pour exprimer le ressenti des patients au fil de leurs chemins thérapeutiques. « Il nous a paru intéressant de tenter d’associer ces deux domaines, en relation avec les associations de malades », explique Jean-Louis Desphieux. En 2014, grâce à l’investissement de l’association Oncobleuets-Courlancy, plus de 30 femmes malades ou guéries avaient exposé leurs œuvres dans le hall de l’établissement. En 2015, le groupe a accueilli le double d’exposants le 2 octobre dernier lors du vernissage de l’exposition intitulée « Quintessence féminine », nom choisi par les patientes elles-mêmes. L’action ayant été étendue aux accompagnants et familles, le taux de participation a été remarquablement élevé. Selon le Dr Henri-Georges Vrillaud, chirurgien et responsable communication à la Polyclinique Les Bleuets : « ce qui fait la particularité de cet événement, c’est que nous ne sommes absolument pas dans le voyeurisme. Chaque patiente ou accompagnant peut donner sa vision intime de son ressenti de la maladie ou de celui de l’accompagnement d’un malade ». En effet, la pléthore d’œuvres, allant du carnet d’esquisses faites pendant les séances de chimiothérapie aux sculptures, photos et peintures témoignent des émotions fortes ressenties au fil chaque chemin thérapeutique. Plus de 200 personnes, l’ensemble des personnels soignants du service de cancérologie, étaient présentes lors du vernissage.
Voyage au cœur du sein, Polyclinique Saint-Côme, Compiègne
Une gigantesque installation, deux seins géants gonflables, avaient été placés devant la Polyclinique Saint-Côme les 28 et 29 septembre derniers, invitant les spectateurs à un voyage unique à l’intérieur des seins d’une femme. Deux étapes étaient envisagées, un sein en bonne santé avec ses lobules, adipocytes et ganglions matérialisés par des éléments aux couleurs éclatantes et un sein malade, symbolisé par des tissus semblables à des mammographies. Il s’agissait de communiquer sur l’importance du dépistage, mais aussi d’être messager d’espoir avec la projection d’un montage vidéo montrant le développement, le traitement et la guérison d’une patiente malade. Cette action réalisée en coopération avec l’Association pour le dépistage des cancers dans l’Oise et La Ligue, a accueilli plusieurs centaines de personnes. Par ailleurs et pour la troisième fois, la Polyclinique a remporté le week-end dernier le trophée « entreprise » avec 240 inscrits pour l’établissement, à la course en faveur du dépistage du cancer du sein « La Compiégnoise ». Le 15 octobre, la Polyclinique organise une journée de collecte pour l’association Ac2pep’s, qui propose une activité physique adaptée aux femmes atteintes de cancer du sein. Des vélos d’intérieur et des rameurs seront installés dans le hall de l’établissement et chaque kilomètre au compteur fera l’objet d’un don de la clinique à l’association. Pour Victoire Vermue, responsable qualité et Martine Mornay, cadre infirmier, « il s’agit de mettre des choses en place pour en faire bénéficier nos patientes qui nous donnent des leçons de vie chaque jour. » La Polyclinique Saint-Côme prend en charge près de 40 % des traitements du cancer du sein dans l’Oise.
Bougez pour Octobre Rose, CHP, Saint-Grégoire
Comme tous les ans, le CHP St. Grégoire (35) du groupe Vivalto Santé se mobilise pour Octobre Rose avec des stands d’animation et d’information au sein de l’établissement, en partenariat avec La Ligue contre le Cancer d’Ille-et-Vilaine. Le 8 octobre, les infirmières, manipulateurs radio ainsi que les bénévoles de La Ligue ont été à la disposition du public et l’ensemble des personnels était vêtu de rose. « Nous souhaitons sensibiliser le plus grand nombre au dépistage du cancer du sein, mais aussi informer sur les possibilités de prise en charge dans notre établissement : le diagnostic de dépistage rapide sur une journée, ou encore la prise en charge en ambulatoire pour la chirurgie du cancer du sein », explique le directeur de l’établissement, Nicolas Bioulou.
Cette année, l’accent a été mis également sur l’activité sportive après le cancer, avec des ateliers escrime et badminton organisés par des coachs spécialement formés par les médecins du sport de l’établissement. « Ces deux spécialités ont l’avantage de faire travailler les bras tout en n’étant pas des sports de contact », ajoute M Bioulou. Le CHP a accueilli environ 300 personnes tout au long de cette journée qui s’est terminée par la représentation du monologue « Cachez-moi ce crâne », écrit et présenté par une patiente de l’établissement, comédienne de métier. « Proposer un monologue sur le vécu de la maladie est une première pour nous et ce format permet au public de libérer sa parole lors du temps d’échange », ajoute Sylvie Aubree, assistante de direction chargée de communication. Jusqu’à fin octobre, le CHP est illuminé de rose, symbole de la lutte et de l’engagement des équipes de l’établissement contre le cancer du sein.
Inspirez et mangez ! Clinique Pasteur, Toulouse
Pour la deuxième année consécutive, la Clinique Pasteur de Toulouse consacre une semaine entière à des ateliers sur le bien-être et la remise en forme autour du cancer du sein. Gymnastique, karaté, yoga, Dragon Boat avec des coachs professionnels. 40 femmes, patientes en chimiothérapie et en radiothérapie, sont d’ores et déjà inscrites à ces ateliers. Egalement très engagée sur le volet nutrition, la clinique proposera une journée cuisine au cours de laquelle des diététiciennes de l’établissement et de La Ligue viendront parler alimentation et cancer. Les deux chefs cuisiniers quant à eux proposeront des ateliers sucré et salé et viendront présenter les engagements de l’établissement en termes d’alimentation et d’approvisionnement. « Nous souhaitons que nos patientes soient heureuses, qu’elles puissent échanger durant cette semaine», explique Céline Gordon, chargée de communication à la clinique.
L’INTERVIEW
Qu’apporte la biologie moléculaire dans les cancers du sein ?
La biologie moléculaire étudie le génome et peut révéler des anomalies spécifiques à certains types de cancers et contre lesquels des traitements efficaces peuvent exister. Cette étude de biopathologie moléculaire se fait directement sur les prélèvements tissulaires à la recherche de la présence d’anomalies génétiques, pour dire si la tumeur analysée pourra bénéficier ou non d’une thérapie ciblée (théranostic). Cependant cette biopathologie moléculaire n’a d’utilité qu’une fois le diagnostic porté. Le diagnostic, c’est le rôle exclusif de l’anatomopathologiste qui procède à une analyse morphologique de la pièce prélevée lors de la biopsie, afin de déterminer si cancer il y a. L’anatomopathologiste va apporter de plus des éléments pronostiques et théranostiques. Dans le cancer du sein, on mesure la taille de la tumeur, on regarde si les ganglions sont envahis ou non, ce qui va avoir des conséquences sur le pronostic mais aussi des conséquences thérapeutiques et on va typer la tumeur car il y a des cancers qui sont plus agressifs que d’autres. Les tumeurs sont enfin classées selon la classification de Scarff et Bloom. C’est avec le cancer du sein que nous avons pu pour la première fois déterminer la présence d’une anomalie génétique dans un cancer courant, et surtout que l’on a pu trouver le traitement pour la corriger.
Dans les années 70 est apparu l’immuno-histochimie qui va révéler l’existence de protéines normales ou anormales. Nous avons trouvé le moyen de marquer ces protéines, une première révolution dans le diagnostic d’anatomopathologie. Depuis le début des années 80, concernant le cancer du sein, nous nous employons à rechercher des récepteurs hormonaux et lançons des traitements anti-récepteurs. Nous savons sélectionner avec l’immuno-histochimie, les personnes susceptibles d’avoir ce type de traitement anti-récepteurs. Dans le cancer du sein, nous savons repérer la sur-expression de la protéine HER 2 (Herceptine®), spécifique à ce cancer, que le traitement va essayer de neutraliser. Et c’est là qu’intervient la biologie moléculaire. Cette protéine HER 2 est quantifiée selon des grilles graduées, (0, +, ++ , +++). En immuno-histochimie, quand il y a une sur-expression de la protéine « +++ », la patiente bénéficiera d’un traitement anti HER 2, pour les cas « 0 » ou « + », nous savons qu’il n’y aura pas de traitement anti HER 2. Lorsque nous avons une zone « ++ », il y a une accumulation de protéines mais nous ne savons pas si ces cas sont accessibles au traitement. Nous repérons ainsi une anomalie et procédons à une amplification au niveau du gène qui code cette protéine. La technique s’appelle l’hybridation in situ (HIS), qui va nous dire s’il y a une réelle amplification du gène et si le « ++ » va passer en « +++ ». Une partie des femmes sera alors traitée avec toutes les chances de succès avec un traitement anti HER 2 et l’autre partie ne sera pas traitée avec ce type de traitement, qui ne serait pas efficace. Avec la biologie moléculaire, nous évitons à un grand nombre de femmes un traitement lourd avec des effets secondaires. Ce sont des techniques que nous maîtrisons dans le secteur libéral et qui y sont très développées. En deux jours vous avez des résultats diagnostiques avec tous les éléments pronostiques, y compris la biologie moléculaire.
Quelle est l’histoire de ces tests ?
La mise sur le marché de ces tests a été rapide et large. Beaucoup de chercheurs en recherche fondamentale partent à la chasse de ces accumulations de protéines ou de ces protéines anormales qui peuvent ensuite intéresser les industriels pour développer le traitement de neutralisation de cette protéine anormale ou en excès. Suit l’expérimentation clinique : phase 1, 2, 3, 4. La HAS fait ensuite une évaluation et donnera ou non l’autorisation de mise sur le marché, puis la sécurité sociale doit enfin proposer une tarification. Le pathologiste doit pratiquer un test qui lui aussi doit être évalué. Cela prend beaucoup de temps. Il y a beaucoup d’incohérences en France mais nous notons quelques progrès. Existent également de nouveaux tests de signature d’expression génomique, qui aident à aiguiller une thérapeutique. Par exemple, les tests Oncotype et PAM 50 qui sont très chers et non remboursés (3000 euros le test). Il n’y a pas actuellement en France de consensus sur ces tests qui font l’objet de travaux de recherche. Ils semblent prometteurs mais seulement sur un petit nombre de cas et ne peuvent être réalisés en France, ce qui nous oblige à envoyer notre matériel tissulaire à l’étranger. Une pression importante est faite par les industriels auprès des oncologues et des associations de patients. Mais ils ne sont pas encore dans la nomenclature et leur coût peut créer une inégalité de chance pour les patientes. Beaucoup de développements pour améliorer ces zones d’incertitudes thérapeutiques sont à attendre sur le cancer du sein.
Quelles sont les problématiques spécifiques du secteur privé libéral ?
Pour le cancer du sein, le secteur libéral est autorisé à procéder à l’ensemble des tests. Il n’en est pas de même pour les autres formes de cancer. Les anatomopathologistes savent faire mais ne sont pas autorisés. Ils doivent donc transférer leur matériel tissulaire et leurs travaux pré-analytiques vers des plateformes de l’Inca en charge de l’analyse moléculaire, avec pour conséquence un allongement des délais et l’impossibilité pour les pathologistes d’exercer leur rôle centralisateur sur l’ensemble du processus : traçabilité, contrôle des étapes, fiabilité des résultats. Alors que le secteur privé réalise environ les deux tiers des diagnostics de cancer, il n’a paradoxalement pas la possibilité de faire ces tests de biopathologie moléculaire alors que 28 plateformes génomiques publiques financées par l’INCA en ont l’exclusivité. Lorsque l’on sait que de nombreux types de cancers, lorsqu’ils sont avancés demandent une réactivité extrême dans la réévaluation des traitements et de l’avancée de la maladie, la situation est pour les anatomopathologistes libéraux, d’un point de vue éthique, difficilement justifiable. Pour les patients, cela signifie une inégalité des chances d’accéder au bon traitement.