Philippe ROMAC
Chargé de la santé de l’enfant et des « 1 000 premiers jours » au cabinet du secrétaire d’État auprès du ministre des Solidarités et de la Santé, chargé de l’enfance et des familles
Philippe Romac précise en introduction que le projet des « 1 000 premiers jours » est une politique de santé publique portée par le Gouvernement. Une commission présidée par Boris Cyrulnik avait remis en septembre 2020 un rapport détaillant des propositions qui ont servi de base aux actions déployées depuis, sur le territoire national.
Une organisation en trois temps
L’organisation du programme 1 000 premiers jours proposée par le ministère, structure un mouvement déjà enclenché. « Nous avons parfaitement conscience de l’engagement des professionnels de santé, des maternités, auprès des parents et des nouveau-nés sur le terrain, en relation avec cette politique des 1 000 premiers jours », précise Philippe Romac.
Les actions définies s’organisent autour des 3 phases d’un projet de naissance : avant, pendant, après. L’entretien prénatal précoce est désormais obligatoire depuis mai 2020. Il est réalisé au sein de la maternité ou en ville, par une sage-femme ou un médecin. « Ce rendez-vous est une porte d’entrée dans ce parcours des 1 000 premiers jours. » Des moyens financiers ont été alloués et un groupe de travail dédié anime cette action. « Nous avons enregistré un taux de participation de 55 % en 2020, ce qui signifie qu’une future maman sur deux a réalisé cet entretien prénatal précoce. Notre objectif est d’atteindre 70 à 80 % d’entretiens prénataux assurés d’ici fin 2022. C’est un élément essentiel pour la mise en place du programme », ajoute Philippe Romac.
Il rappelle le rôle essentiel des maternités et des maisons de naissance, qui sont un passage universel dans le cadre de l’accouchement. « L’approche pluridisciplinaire, médico-psychosociale, est très importante car elle permet aux différents acteurs du parcours de repérer les fragilités et de préparer à la sortie. » Le Gouvernement mise également sur les antennes de la PMI (protection maternelle et infantile) en région pour assurer le lien avec les maternités et accompagner les parents dans les phases anté et postnatales. « 35 millions d’euros ont été affectés à la PMI dans 70 départements en 2021 : des moyens financiers importants. Nous souhaitons contractualiser avec l’ensemble des départements en 2022. »
La préparation du retour à domicile fait l’objet d’attentions particulières, avec la mise en place annoncée par le Président de la République le 28 septembre 2021 lors des Assises de la santé mentale, d’un entretien postnatal obligatoire autour de la 5e semaine après l’accouchement, puis d’un deuxième autour de la 12e, assurés par un médecin, une sage-femme ou une infirmière puéricultrice. « L’objectif est de déceler les troubles psychiques, les dépressions post partum, qui touchent selon les estimations 100 000 femmes par an en France. Ces troubles sont insuffisamment diagnostiqués et encore trop peu pris en charge ou trop tardivement. »
Améliorer l’accompagnement à domicile
La place des deux parents dans les soins et le développement de l’enfant est essentielle, rappelle Philippe Romac, plus encore lorsque l’enfant naît prématurément. Aussi, l’objectif poursuivi par le projet des 1 000 premiers jours est de déployer un parcours d’accompagnement qui permette un retour à domicile de ces nouveau-nés prématurés plus tôt que ce qui se fait aujourd’hui. « Tous les services de néonatologie ne sont pas conçus pour pouvoir inclure pleinement les parents, tous ne disposent de suffisamment d’espace ; nous voulons systématiser le réflexe d’impliquer les parents, au degré souhaitable. »
La création d’équipes mobiles et de nouvelles unités de soins parent-bébé en psychiatrie périnatale font partie des actions en cours, en lien avec les ARS qui sélectionnent les projets.
Au-delà du soin, « de beaux projets ont été identifiés par les ARS, les Dreets (Directions régionales de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités), les CAF et les commissaires à la lutte contre la pauvreté, afin d’englober également les aspects sociaux. »
Des outils pour toucher un peu plus les parents : mieux les sensibiliser et mieux les informer
Les 1000 premiers jours constituent une période clé où l’enfant doit faire l’objet d’une interaction bienveillante et sécurisante avec les adultes qui l’entourent, de même d’une attention particulière à son environnement. Un certain nombre d’outils sont disponibles pour le rappeler et transmettre des informations pratiques.
Quatre outils et actions ont été mis en place en 2021 pour sensibiliser et informer. Un site de référence 1000-premiers-jours.fr, lancé avec Santé publique France le 15 septembre 2021, regroupe un ensemble d’informations scientifiques et des conseils apportés aux parents. Sur la partie numérique, une application disponible pour les smartphones et déjà téléchargée plus de 30 000 fois depuis l’été vient en complément. « L’application diffuse de l’information, mais surtout, elle est une source d’accompagnement qui vise à mieux guider et orienter les parents. Elle est amenée à évoluer, tout comme l’ensemble des outils d’ailleurs. » Le déploiement de ces outils est couplé à une campagne de communication de lancement : une à destination des professionnels de santé en octobre 2021 et une autre début novembre pour le grand public via les grands médias classiques et les réseaux sociaux. Enfin, chaque déclaration de grossesse à la CAF déclenche désormais l’envoi aux futurs parents d’un livret papier sur les 1 000 premiers jours. « Ce fascicule a simplement vocation à rappeler des messages de santé publique de manière un peu intemporelle sur cette période des 1 000 premiers jours. C’est une manière d’attirer l’attention et de dire aussi aux parents qu’ils ont naturellement la plupart des réponses en eux. » Les 15 000 premiers exemplaires viennent de partir, pour à terme atteindre quelque 60 000 envois par mois, qui correspondent à la moyenne mensuelle des naissances en France.
La bébé box
Annoncée par le Président de la République en septembre, la bébé box sera déployée avec l’aide des maternités dès février-mars 2022.
La bébé box est en fait un sac en bandoulière qui contient des objets symboliques : du savon, un bavoir, une turbulette, un livre d’éveil… Elle sera distribuée en maternité par les professionnels et permettra une entrée en discussion et des échanges sur les questions liées à la parentalité, ce que les jeunes parents vivent et ce qui les attend. « La bébé box contiendra également des messages de santé publique pour dire toute l’attention qu’il faut porter à cette période cruciale du développement de l’enfant. Une période de bouillonnement sensoriel, pour citer Boris Cyrulnik », conclut Philippe Romac.