Maxime CARLIER, directeur de l’hôpital privé Saint Martin à Caen
Dans quelles circonstances avez-vous décidé de déclencher le Plan blanc dans votre clinique ?
Mardi dernier, à 9h, j’ai jugé que nous n’étions pas en situation d’assurer le fonctionnement de notre établissement. Entre la neige et les congères, tous les accès autour de Caen étaient coupés, j’ai moi même dû venir à pied, depuis le village où j’habite, cinq kilomètres plus loin. Il était impossible d’accéder à la route, impossible d’assurer les sorties de patients car les ambulances ne circulaient pas, près de 20 personnes étaient absentes. Toute une logique de flux avait disparu : le constat de la défection du personnel et de l’absence de voies d’accès nous a amenés à déclencher le Plan blanc.
Comment les choses se sont-elles déroulées concrètement ?
C’est la première fois que je vis ça ! Le Groupe Générale de Santé a mis en place des procédures de gestion de crise qui nous sont utiles dans ces situations. Avec le Plan blanc, nous gérons les priorités d’action pour prendre les décisions qui maintiennent la sécurité des soins. Le préfet et les ARS ont été prévenus dès mardi matin. Nous avons d’abord passé beaucoup de temps au téléphone pour décommander les patients et éviter que les plus prévoyants ne viennent en avance par leurs propres moyens. Nous avons pris la décision d’annuler toute la chirurgie froide (près de 90 interventions mardi) et de laisser fonctionner uniquement les urgences. Nous avons gardé dans des lits les patients qui devaient être opérés mardi, ils sont toujours en attente. 35 patients sortants sont encore bloqués. Nous avons 200 patients présents, j’ai dû appeler les pompiers pour aller chercher 6 patients à dialyser bloqués à leur domicile. Nous avons dialysé jusqu’à une heure du matin. Le Plan blanc permet de demander aux soignants de dormir sur place pour assurer la continuité des soins. 70 soignants sont donc restés dormir dans l’établissement ! Je vous assure qu’une situation de ce type fédère les équipes ! Malgré tout ça, l’ambiance est bonne. Et heureusement, nous n’avons pas eu de problèmes d’électricité ni de logistique, en matière d’alimentation nous tenons jusqu’à jeudi… Mais il faut gérer les rotations de personnel, la fatigue. Certains sont mobilisés depuis près de 36 heures ! Concrètement, j’ai l’impression d’être sur un bateau coupé du reste du monde…
Avez-vous l’impression qu’avec la neige vous devez faire face à un afflux de patients plus
important ?
Tant qu’il ne s’agit que de neige, tout va bien. Mais les orthopédistes nous ont prévenus : dans deux jours, le verglas va faire son apparition et là, les risques de chute augmentent. Cependant, la situation routière devrait revenir à la normale d’ici deux ou trois jours.