1,2, 3 Questions – Didier JAFFRE

Didier JAFFRE, directeur général de l’ARS Occitanie

Comment le Projet régional de santé a-t-il été élaboré en Occitanie ?

L’ARS Occitanie finalise son projet régional de santé (PRS) qui satisfait aux objectifs de la stratégie et de la politique nationale en santé mais conserve une spécificité régionale. L’ARS Occitanie a choisi de coupler le PRS et la démarche du Conseil national de refondation en santé. Ainsi PRS et CNR ne font plus qu’un, avec un nouveau paradigme : partir des besoins des habitants aujourd’hui et demain, et non plus de l’offre existante. Certes l’offre de santé aujourd’hui rencontre des difficultés, notamment en termes de ressources humaines, mais nous devons être ambitieux pour répondre aux besoins de santé dans notre région qui ne font et ne feront qu’augmenter, compte tenu du boom démographique et du vieillissement.

Du fait de la force de la prégnance départementale, les 13 conseils territoriaux de santé occitans, avec l’aide des délégations départementales, ont élaboré un schéma départemental de santé sur l’ensemble des champs de compétences de l’agence. Nous sommes la seule région à l’avoir fait, toujours en partant des besoins et en s’appuyant sur les remontées des CNR santé. Ces schémas départementaux font partie intégrante du nouveau schéma régional de santé, dans le cadre des 6 engagements prioritaires et objectifs associés définis régionalement avec la CRSA.

Sur le terrain, comment évaluer les besoins en santé ?

Pour sortir de l’habitude de partir de l’offre, le PRS a été élaboré en collaboration avec la Commission spécialisée dans le domaine du droit des usagers du système de santé. De plus, une enquête réalisée auprès des 6 millions d’habitants de la région Occitanie, pour savoir ce qu’ils attendent en santé, indique qu’ils souhaitent accéder à la santé – prévention, éducation à la santé, diagnostic -, et pas uniquement aux soins. Ils aspirent aussi à ce que les professionnels de santé aient du temps à leur accorder. C’est plus de 42 000 personnes qui ont contribué à cette consultation et nous en avons repris les souhaits et les attentes dans le PRS.

Par ailleurs, la croissance démographique en Occitanie est forte. Nous dénombrons 40 000 habitants supplémentaires chaque année, soit en 2040 plus 1 million d’habitants. Au-delà de ce dynamisme démographique, l’Occitanie accueille 1 million de touristes tous les ans. Les décisions prises dans le PRS impacteront les 20 ans à venir. Notre défi est de développer l’offre de santé. Nous travaillons pour l’avenir et devons être vigilants aux conséquences à long terme des décisions prises aujourd’hui. Il faut dépasser le contexte actuel, pour se projeter dans le futur et demeurer ambitieux.

Au regard des caractéristiques de la région Occitanie, l’ambition portée par l’ARS est de mobiliser les acteurs de santé et ses partenaires pour davantage prendre en compte les besoins des personnes les plus vulnérables et d’agir plus efficacement, pour réduire les inégalités de santé ou a minima, ne pas les aggraver.

De quels outils disposent les ARS ?

Pour adapter son PRS aux spécificités territoriales et géographiques et répondre aux attentes des habitants, le directeur général de l’ARS dispose désormais d’un droit de dérogation, à condition de respecter l’équité des territoires (décret 2023-260 du 7 avril 2023). En réponse à la pression démographique, l’ARS Occitanie a fait usage de ce droit de dérogation en matière d’autorisations pour l’imagerie médicale notamment. Le temps d’installation d’un appareil de diagnostic provoque un renoncement aux soins. Nous ne pouvons pas perdre le temps nécessaire à l’implantation d’appareils qui relèvent de la prévention. Le droit de dérogation accélère les procédures pour que les équipements satisfassent à la pression démographique. L’ARS Occitanie fera usage de ce pouvoir de dérogation sur différents sujets. Pour en faciliter l’accès, un document sur la méthode relative à cette demande de dérogation à l’attention des partenaires est en préparation.

La proposition de loi Valletoux visant à améliorer l’accès aux soins par l’engagement territorial des professionnels octroie des prérogatives aux conseils territoriaux de santé. L’ARS Occitanie accorde aux conseils territoriaux de santé le pouvoir de se prononcer en termes d’opportunité sur les demandes. Les acteurs locaux : usagers, élus et offreurs, doivent échanger et participer. Ces avis ne modifient en rien le parcours normal à toute demande auprès de la Commission spécialisée de l’offre de soins, mais apportent encore plus de démocratie et de participation à la décision.