Dr Antoine BRACONNIER, néphrologue & président du Club des jeunes néphrologues (CJN)
Comment définir la pratique d’un jeune néphrologue ?
Même si les pratiques diffèrent avec le lieu d’exercice, l’activité de néphrologie reste multimodale. Nous exerçons dans les établissements publics (universitaires ou généraux), privés ou/et associatifs. Certains praticiens réalisent parfois une activité mixte au sein de ces différentes structures. Cette multiplicité des pratiques se retrouve au sein de notre club, où les profils des néphrologues se complètent. La majorité des néphrologues orientent leur activité vers la prise en charge clinique des patients (hospitalisation, soins intensifs ou réanimation, dialyse chronique, exploration physiologique, consultation de néphrologie ou de transplantation), d’autres sur la recherche (fondamentale ou non).
Le néphrologue ne travaille pas seul. Avec 6 millions de patients atteints d’IRC en France et seulement 1 500 néphrologues, répondre à cette demande impose une coopération avec nos collègues spécialistes et tout particulièrement les généralistes. Sa prise en charge repose également sur un exercice multiprofessionnel, en collaboration avec diététiciens, psychologues, assistantes sociales, infirmiers de coordination, pour une optimisation du suivi des patients via notamment des programmes d’éducation thérapeutique et le récent parcours MRC. L’arrivée de nouveaux métiers comme celui des infirmiers en pratique avancée (IPA) apporte une aide précieuse dans le suivi souvent complexe de nos patients.
Pour nous aider, des améliorations technologiques, boostées par la pandémie Covid, comme la télémédecine ou la télésurveillance, sont également utilisées.
La qualité de vie du patient est un élément de mieux en mieux pris en compte et fait l’objet d’une attention particulière des professionnels. Elle est aussi l’objet de travaux de recherche clinique, parfois en lien avec les associations de malades.
L’avenir est également plein de promesses avec l’apparition des outils du big data (date re-use*, intelligence artificielle…) et l’explosion de la génétique qui, même si leur place reste encore à préciser, devraient apporter une aide précieuse aux futurs praticiens.
Quelles pistes d’amélioration proposez-vous ?
Un des enjeux actuels est la prévention de la MRC, mais plus largement sa prise en charge, en optimisant l’interaction avec la médecine de ville. Nous attendons beaucoup de la sensibilisation au dépistage de nos collègues généralistes, et ce d’autant que de nouvelles molécules pourraient freiner la progression de cette maladie aux multiples modes d’entrée (hypertension artérielle, diabète, infection, maladie auto-immune…).
L’accessibilité à un greffon rénal est également en enjeu majeur. De nombreuses initiatives sont mises en place en ce sens : don vivant, rein issu de donneur à critère élargi ou de la procédure Maastricht III, travail auprès des familles sur le taux de refus de prélèvements d’organes.
Lorsque la transplantation n’est pas possible, proposer au patient la prise en charge la plus adaptée à son projet de vie est un véritable pari de démocratie en santé : dialyse à domicile (dialyse péritonéale, hémodialyse quotidienne, hémodialyse longue nocturne), traitement conservateur…
Enfin, l’évaluation de la fragilité du sujet âgé est une vraie question éthique : Comment appréhender la fragilité du patient avant la dialyse ou durant la dialyse ? Avec le vieillissement de la population, faut-il prendre le risque d’une transplantation lorsqu’un patient est stabilisé en dialyse ?
Autant de défis auxquels les néphrologues d’aujourd’hui et de demain devront répondre.
* Réutilisation de données issues de bases de données via le SNDS, la SNAM, etc.