1,2, 3 Questions – Pr Lionel COLLET

Pr Lionel COLLET, Président de la HAS, conseiller d’État depuis 2013, docteur en médecine et en biologie humaine.

Professeur Lionel Collet, vous êtes le 5e président de la HAS élu pour un mandat de 6 ans. Quels sont vos objectifs ?

Mon projet repose sur la continuité dans l’amélioration des travaux de la HAS en respectant les notions d’indépendance et de rigueur scientifique, indispensables au respect de l’expertise de nos avis par les professionnels, patients et usagers du système de santé. Pour ce faire, je souhaite d’une part que la place des usagers et patients dans nos commissions soit renforcée, et d’autre part, intégrer plus d’experts en sciences humaines et sociales à nos travaux. Les recommandations de la HAS ont vocation à être omniprésentes dans le système de santé.

Par ailleurs, la HAS évalue des innovations en santé : médicaments, dispositifs médicaux, organisations…. Dans quelles mesures ces innovations améliorent-elles la prise en charge, l’accompagnement et la santé des Français ? Je souhaite que la HAS consacre tous les 4, 5 ou 6 ans son rapport d’analyse prospective du système de santé à ce sujet.

Enfin, notre communication doit continuer à être réfléchie et adaptée aux professionnels de santé, patients et usagers afin que nos recommandations soient largement diffusées et connues.

Dans quelle mesure la maturité d’un système de santé peut-elle être jugée à travers sa démarche qualité ?

Plus un système de santé a la capacité de s’auto-évaluer et d’être évalué, plus il est mature en effet. Évaluer la qualité pour l’améliorer est une mission phare de la HAS. Cela implique un accès à l’information et aux données scientifiques probantes par la HAS dans un unique objectif : l’amélioration continue du système de santé.

En 2004, la création de la HAS a résulté d’une maturation de la réflexion sur la pertinence des actes de soins, la qualité de la prise en charge et l’évaluation des pratiques et actes des professionnels, ainsi que des produits de santé. Cette maturité est issue des travaux des agences qui l’ont précédée, à savoir l’Agence nationale de développement de l’évaluation médicale (ANDEM) créée en 1989, à laquelle a succédé l’Agence nationale pour l’accréditation et l’évaluation de santé (ANAES) à partir de 1999.

La médecine est passée d’une justification basée sur des arguments d’autorité à une justification fondée sur la science. L’argument d’autorité a été délaissé au profit d’une démonstration à partir d’études et de fondements objectifs. Il n’y a de progrès que s’il est fondé sur la science et la rigueur scientifique. La science évoluant, elle impose une réflexion permanente sur la qualité des pratiques, des parcours, des produits de santé et des organisations.

L’une des missions de la HAS est d’émettre des avis et recommandations fondés sur la science. Quelle est la méthode utilisée pour d’une part fournir l’expertise nécessaire et d’autre part garantir une totale indépendance d’intérêt ?

Pour conserver rigueur scientifique et indépendance, la HAS doit faire preuve de transparence. Tous les experts professionnels et usagers qui contribuent aux travaux de la HAS (environ 1 500 chaque année) remplissent une déclaration publique d’intérêt, actualisée annuellement. Ces déclarations sont toutes analysées par notre déontologue. En cas de conflit d’intérêt sur un travail donné, l’expert ne participe pas à la décision. Cependant si sa compétence est avérée, il est auditionné et son lien d’intérêt est affiché en toute transparence. La rigueur de la démarche, parfois dénoncée par les industriels, garantit l’indépendance et la transparence des avis et recommandations de la HAS. Ainsi, auditionner des personnes de grande qualité n’est pas exclu. La méthode me semble juste et j’ai confiance.

Au-delà de son expertise, durant toute la pandémie, la HAS a démontré sa capacité à répondre rapidement aux demandes qui lui ont été adressées. Elle a fait preuve d’adaptabilité. La HAS de demain doit être en mesure de travailler selon différentes temporalités en distinguant l’expertise de droit commun qui nécessite une réflexion dans un temps plus long, et l’expertise en urgence. Nous devons déployer une efficacité organisationnelle, de procédure et de communication pour répondre à toutes les sollicitations.