Dr Karem Slim, président du groupe GRACE, service de chirurgie digestive et unité de chirurgie ambulatoire au CHU Estaing (63), secrétaire général du Collectif écoresponsabilité en santé
Pouvez-vous présenter le Groupe de réhabilitation après chirurgie, Grace ?
Depuis sa constitution en 2014, Grace vise à promouvoir la réhabilitation améliorée dans tous les secteurs de la chirurgie. La littérature démontre que la réhabilitation améliorée après chirurgie (RAC) est efficace en termes de réduction de la morbidité, du temps de séjour et de récupération du patient. En plus la RAC est vertueuse sur le plan médico-économique.
Grace, version francophone d’un mouvement du nord de l’Europe, s’adresse aux chirurgiens, anesthésistes et paramédicaux engagés dans le développement de la réhabilitation améliorée après chirurgie en France, Belgique, Suisse, au Luxembourg, et plus récemment dans les pays francophones du Maghreb.
La RAC concerne tous les secteurs de la chirurgie. Actuellement les chirurgies orthopédique, colorectale, gynécologique et thoracique sont les plus avancées. Les chirurgies maxillo-faciale et pédiatrique disposeront bientôt d’un espace dédié sur notre site. D’ici la fin de l’année, toutes les spécialités chirurgicales disposeront d’un protocole de RAC.
Sur notre site également, les adhérents disposent de protocoles modèles pour les soins péri-opératoires associés à chaque spécialité, de vidéos pour promouvoir la RAC et d’un espace audit (gratuit) et labélisation.
Comment fonctionne la labélisation Grace ?
Actuellement, nous recensons 59 centres labélisés. Le label Grace est attribué annuellement à une équipe pour une spécialité chirurgicale. Il encourage, reconnaît et récompense les bonnes pratiques.
En amont de la labélisation, un audit gratuit des pratiques relatives aux patients et aux actes en péri-opératoire est réalisé en ligne. Les données sont interprétées par des schémas, histogrammes et graphiques qui permettent à l’équipe chirurgicale de s’évaluer et d’identifier les pistes d’amélioration.
Le niveau d’exigence du cahier des charges du label Grace va croissant. Il requiert en particulier une équipe multidisciplinaire, au minimum 50 % des interventions réalisées selon le protocole RAC et incluses dans le système d’audit, la participation du patient à son parcours de soins et l’organisation de réunions annuelles de l’ensemble de l’équipe, pour fournir un temps d’évaluation et de partage avec d’autres spécialités ou d’autres centres.
Le label Grace nécessite un engagement des équipes pour améliorer la qualité et la sécurité des soins. Il leur confère une visibilité et assure aux patients une préoccupation permanente d’amélioration de la prise en charge en chirurgie. Cependant, le corollaire à toute sortie rapide après chirurgie est la gestion des risques lors du suivi postopératoire : appel téléphonique, visite à domicile, consultation ou téléconsultation.
Quels sont vos projets ?
Dès 2024, nous voudrions rendre la RAC obligatoire car elle est bénéfique à toutes les parties prenantes : le patient, les professionnels et le secteur d’activité. Les analyses économiques menées démontrent un gain moyen par patient de 1 000 euros. Il y a moins de médication, de complications et un temps de séjour réduit. Étant donné les gains financiers réalisés, nous estimons que l’investissement – en temps de réflexion, de travail collaboratif, de suivi et d’amélioration de la qualité et de la sécurité – fourni par les équipes devrait être rémunéré.
À plus long terme, nous militons pour que RAC et ambulatoire se confondent. Tout patient doit en chirurgie être pris en charge selon les principes de la RAC, même si une adaptation du programme selon les conditions cliniques est parfois nécessaire. Il faut maintenir la RAC partout où cela est possible.
Les collaborations menées avec la quasi-totalité des ARS pour la mise en place de programmes témoignent de la reconnaissance et de l’intérêt de notre démarche.