Nous partons de loin : la France ne dispose plus de plan national de périnatalité depuis 16 ans alors même que la mortalité néonatale ne diminue plus depuis 20 ans. De plus, une crise démographique sans précédent touche tous les métiers, celui de la naissance n’y fait pas exception. Le rapport de l’Académie nationale de médecine sorti ce mois-ci recommande une réduction accrue du nombre de maternités en regroupant celles de type 1 avec celles des types 2 ou 3, et en particulier toutes celles qui assument aujourd’hui moins de 1 000 accouchements par an.
La solution serait-elle aussi simple : fermer certains établissements pour mieux doter d’autres ? C’est faire le pari risqué que les ressources humaines migreront au gré des regroupements annoncés. C’est aussi ignorer les dynamiques propres à chaque région et leur désir de souveraineté. Généralement, les décisions louables prises à Paris sont vouées à l’échec en province, les solutions applicables aux territoires franciliens ne sont pas nécessairement celles qui le seront ailleurs. Dommage que ce rapport d’une grande qualité soit entaché par la « pensée unique » qui ne peut que retarder la mise en œuvre des solutions issues des territoires. C’est aussi faire le pari que la France, aujourd’hui à 700 000 naissances par an, ne connaîtra plus les plus de 800 000 naissances comme dans les années 2010.
Surprenant est aussi notre capacité collective à accroître les difficultés en prenant des décisions au mauvais moment, comme celle de l’augmentation de 5 à 6 ans de formation des sages-femmes. Les maternités françaises s’exposent donc à une année prochaine sans arrivée de nouvelles sages-femmes diplômées sur le marché de l’emploi. Le mieux est ici l’ennemi du bien : nos voisins européens forment en 4 ans leurs sages-femmes sans qu’aucun indicateur qualité ne se dégrade.
Le système de santé, c’est d’abord des professionnels pluriels qui adhèreront avec peine à une pensée unique et centralisatrice. Les solutions pérennes seront celles que les acteurs de terrain sauront trouver et mettre en œuvre. Cela suppose toutefois une volonté collective de remettre en cause certaines pratiques de prise en charge des parturientes et de redéfinir les compétences de chacun en dépassant les corporatismes.
Le risque est sinon de voir se développer des déserts obstétricaux et se dégrader la qualité de prise en charge. Une vision à long terme s’impose mais aussi à très court terme car l’urgence immédiate est d’organiser l’été 2023…
Frédérique Gama
Présidente de la FHP-MCO