Une mobilisation pour Octobre Rose durant la Covid
Les contraintes sanitaires auraient pu avoir raison de cette édition 2020 mais c’était sans compter sur la motivation des équipes et leur résilience.
Les établissements de santé privés n’ont donc pas passé leur tour. Si certains d’entre vous ont réduit leur programme, d’autres l’ont modifié quitte à transformer des évènements présentiels en initiatives digitales originales. Par les efforts démontrés, les équipes attestent de leur intérêt dans une démarche préventive à l’heure où elles se mobilisent aussi dans l’urgence dans la lutte contre l’épidémie de la Covid.
Rappelons que le récent rapport IGAS-IGESR pointe des résultats des dépistages très éloignés des objectifs. Cette campagne Octobre Rose revêt donc un moment important dans la lutte contre le cancer du sein, en particulier cette année 2020 où il est acté que des retards de diagnostics et de prises en charge sont réels, dans des proportions importantes et très préoccupantes.
9 éditions du Fil rose ont été nécessaires pour relater votre engagement : bravo et nos remerciements à toutes et tous.
En cette période de reprise de la pandémie, nous adressons tout notre soutien à l’ensemble de vos équipes médicales, paramédicales et administratives.
Ace réussi pour Octobre rose
Polyclinique La Pergola, Vichy (03)
Suite au succès des éditions passées, l’Open de golf caritatif de la Polyclinique La Pergola « Ensemble contre le cancer du sein » revenait pour sa 5e édition le 4 octobre dernier. « Il s’agit d’une compétition de golf destinée à toute la population, les non-initiés et les amateurs comme les joueurs confirmés », précise Yann Grapin, directeur opérationnel de l’établissement. « Et par chance, le golf permet de respecter les gestes barrière, donc nous n’avons pas hésité. » Cette compétition originale permet chaque année de collecter des fonds au profit d’associations locales d’aide aux patients, et en particulier cette année : Abidec, Aparthe, AVML, Les petits bonnets, Geneticancer, Gym après cancer, La ligue contre le cancer et Sportonco.
Des instants de vie
Polyclinique Lyon Nord, Rillieux-la-Pape (69)
Octobre Rose sous l’œil du photographe. La Polyclinique Lyon Nord a adapté ses actions aux exigences sanitaires cette année avec un projet original, photographier des instants de soins et de vie à la polyclinique. Tout au long du mois d’octobre, des clichés de personnels soignants et de patients viennent enrichir une belle collection qui sera affichée, attestant d’un engagement sans faille des équipes dans le cadre de leur mission.
La campagne de dépistage du cancer du sein a été aussi cette année l’occasion de présenter certains ateliers proposés dans le cadre des soins de support. Conseils pour prendre soin de soi, se maquiller, diététiques,… plusieurs temps organisés tout au long du mois par la socio-esthéticienne et la diététicienne de la clinique en direction des patientes en cours de traitement. Enfin, une séance d’information sur l’importance du dépistage du cancer du sein était organisée entre « midi et deux » spécialement pour les personnels de la polyclinique, en collaboration avec un laboratoire et le Centre de dépistage des cancers Auvergne-Rhône-Alpes.
Un peu de douceur
Clinique Pasteur, Toulouse (31)
Pour amener un peu de douceur dans les difficiles moments de chimiothérapie, un repas rose a été initié par les diététiciennes de la Clinique Pasteur, préparé par les chefs de cuisine, et servi aux patients lundi 26 octobre par les hôtelières du service de jour de l’Atrium. Au menu, une mousseline de betterave à l’avocat et crevettes, spaetzles froides à la vinaigrette de betterave avec son saumon grillé et ses perles balsamiques, macaron aux framboises sur un lit de mascarpone vanille et son coulis aux fruits rouges, thé aux fruits rouges. Merci aux équipes pour cette belle attention !
Tous unis pour Octobre rose
Polyclinique du Maine, Laval (53)
Unis pour une même cause, sensibiliser les femmes au dépistage du cancer du sein, des médecins, infirmiers et bénévoles de la Ligue contre le cancer et le Centre régional de coordination des dépistages des cancers étaient présents dans le hall d’accueil de la Polyclinique du Maine le mardi 27 octobre. « Ce sont pour la plupart des professionnels de soins retraités qui viennent, c’est un très beau geste de leur part », explique Emmanuelle Helbert, assistante de direction. Pendant toute une journée, les personnels de la polyclinique, patients en consultation et les quelques visiteurs autorisés à pénétrer l’enceinte de l’établissement, ont pu parfaire leurs connaissances sur les bons gestes d’autopalpation, à l’aide d’un buste. « Cette journée est un appel fait aux femmes pour prendre cette cause au sérieux et adopter les gestes de dépistage. » La campagne était relayée par l’ensemble des équipes, tout en rose, le temps d’une journée, et célébrée autour d’un repas convivial sur les tons roses, à l’attention des patients et des collaborateurs de la polyclinique.
Apprendre l’auto-palpation
Clinique Sainte Thérèse, Paris (75)
Les consignes de sécurité n’ont pas eu raison de l’intervention de la réflexologue plantaire qui est habituellement à disposition des patientes de la maternité. Toutefois, le 28 octobre il a fallu s’adapter. « Nous n’avons pas voulu annuler notre participation à Octobre Rose, historique, et qui nous est chère. Donc, nous animons comme chaque année un stand d’information à l’accueil de la clinique, car communiquer est essentiel. Cette année, nous avons innové en conviant notre réflexologue qui a su rebondir. Plutôt que d’offrir des massages bien-être, elle a délivré les clefs de l’auto-massage des mains aux parturientes et au personnel de la clinique. L’occasion d’évoquer par la suite le sujet de l’autopalpation. Elles sont jeunes mais nous les invitons à davantage prendre conscience de leur corps », explique Lucile Montet, adjointe de direction. Une journée sous le signe de la sérénité et de la relaxation, agrémentée d’une distribution de macarons roses Ladurée, offerts comme chaque année par le prestataire de bio nettoyage.
Aux petits oignons
Clinique Ambroise Paré, Thionville (57)
En clôture d’Octobre Rose, la Clinique Ambroise Paré propose aujourd’hui 29 octobre un repas rose concocté par Jean-Jacques et Valérie, tous deux chefs cuisiniers du prestataire en restauration de la clinique. « Les patients aujourd’hui se régalent d’un pâté de foie aux oignons confits au vinaigre de framboise, de paupiette de saumon sauce aurore accompagnée de riz et de chou-fleur, de gouda et en dessert de tiramisu fraise. À défaut de pouvoir organiser une grosse manifestation cette année, nous souhaitons marquer le coup avec un bon repas », explique Laurie Fontaine, assistante de direction. Une manière imparable pour faire passer le message de dépistage à l’ensemble des patients, lors d’un moment convivial, apprécié de tous.
Emmanuel JAMMES
Délégué mission société et politiques de santé à la Ligue contre le cancer
La France est confrontée à une pénurie de médicaments. De quelles ampleur et nature est-elle ?
Depuis quelques années, nous recevions des témoignages disparates de patients s’inquiétant de l’indisponibilité de leur médicament. Tout d’abord, nous avons répondu de façon individuelle et cherché des solutions, puis, nous avons pris en compte la somme des situations individuelles pour attester d’un problème collectif.
L’agence nationale de médicaments déclare chaque année des pénuries de tous types de médicaments, pas seulement en cancérologie, dont le nombre augmente depuis une dizaine d’années. En 2019, 1 499 médicaments manquaient en France. Ces médicaments ont-ils été indisponibles 3 jours ou 1 mois ? Une ou plusieurs fois ? Quelles sont les personnes qui n’ont pas eu accès à leur médicament en temps et en heure ?
Comme souvent, la cancérologie est un modèle. Il y a beaucoup de médicaments anticancéreux en rupture car ils sont plutôt anciens et peu lucratifs, et aucun parmi les médicaments de pointe. Manquer d’un médicament emblématique comme le BCG Medac indiqué pour traiter le cancer de la vessie n’est pas comparable à manquer de Doliprane. Or, la seule alternative au BCG Medac est l’ablation de la vessie : c’est une perte de chance !
Cette pénurie est très anxiogène pour les patients car nous ignorons combien de temps le médicament sera indisponible. De même, gérer une pharmacopée dont des éléments essentiels sont indisponibles est très difficile pour des professionnels de santé dont la vocation est de soigner. Impuissants, ils cachent parfois cette information alors que les patients ont le droit de savoir. Le recensement des pénuries et des patients victimes est nécessaire pour mesurer sur le long terme les éventuelles conséquences délétères. On n’est pas totalement certains qu’il n’y ait pas de pertes de chance.
La crise Covid a été révélatrice et a mis un coup de projecteur sur des produits qui étaient en rupture d’approvisionnement parce que la demande était très forte. C’est un cas différent des problèmes structurels d’approvisionnement des médicaments contre le cancer et d’autres pathologies chroniques pour lesquels l’approvisionnement se fait à flux tendu de manière à éviter les coûts.
Quelles sont les causes de ces pénuries ?
Les causes sont multiples : problèmes d’approvisionnement parce que les substances sont fabriquées très loin, en particulier pour les médicaments qui sont les moins rentables ; choix industriels pour réduire les coûts de production et contourner les réglementations relatives aux normes environnementales plus drastiques en Europe qu’en Asie du Sud Est ; coûts de production plus faibles mais au prix d’une logistique plus importante et soumise à des problèmes organisationnels dans le chaînage d’approvisionnement des hôpitaux en France et en Europe.
Les pénuries sont mondiales mais surtout dans les pays qui négocient plus fortement les prix des médicaments. Nous sommes au balbutiement d’une négociation européenne et travaillons sur ce point avec la European Cancer League.
Des projets de réindustrialisation sont depuis longtemps dans les cartons des industriels et réapparaissent opportunément à cause de la Covid mais nous ne sommes pas dupes. Ils ont un bon rôle en ce moment : seuls à disposer des substances, personne ne peut faire sans eux.
Stocker les médicaments a un coût pour les industriels, cette logique industrielle doit s’accorder à celle de santé publique : on est au milieu des deux en ce moment. Nous attendons toujours la sortie du décret sur la gestion des stocks et espérons que les médicaments les plus importants seront intégrés dans les stocks les plus longs. Aux industriels de trouver les solutions et ce n’est pas à l’Assurance maladie de payer plus cher des médicaments aux coûts inflationnistes.
Pour notre part, peu importe où le médicament est produit, nous souhaitons seulement qu’il soit disponible. Il est clair que c’est plus facile s’il provient, sur le plan de la chaîne logistique, de Clermont Ferrand plutôt que de Shenzhen, en Chine. C’est au ministère de l’Industrie et de l’Économie, avec le concours du ministère de la Santé et des agences compétentes, de trouver des solutions pour le bien collectif.
Quelles sont les actions que vous demandez ?
Nous souhaitons la mise en place d’un système d’information sur les pénuries de médicaments pour connaître l’origine, la durée, l’historique des pénuries. Les médicaments n’étant pas un produit de consommation comme un autre, il n’est pas acceptable que sa pénurie soit juste un fait comptable, sans transparence ni analyse profonde des causes.
Nous demandons aussi l’application des actions coercitives prévues auprès des industriels du médicament. C’est le rôle d’associations comme la Ligue contre le cancer ou France Assos Santé d’entrer dans ce rapport de force et de rappeler qu’il ne faut pas démissionner face au chantage de la délocalisation. Nous représentons des malades et ils ont quelque chose à revendiquer.
Toute la transparence et l’entière traçabilité de ces pénuries doivent être faites. Certes, les causes sont complexes, d’ordre financière, politique, économique, etc., mais nous devons nous focaliser sur les conséquences car les patients souffrent. Pour l’heure, nous avançons avec les témoignages toujours plus nombreux de patients. Depuis un mois, nous collectons des données via https://penuries.ligue-cancer.net/ afin de rassembler toujours plus d’informations et renforcer nos propositions auprès des pouvoirs publics. Il ne faut pas oublier non plus que même si le phénomène des pénuries de médicaments est globalement connu, certains patients victimes ne sont pas forcément conscients qu’ils sont directement concernés car non informés par leur médecin. Nous alimentons ainsi le débat sur ce sujet. Je pense que le ministre de la Santé est à l’écoute du problème mais il n’est pas le seul décisionnaire dans ce dossier complexe et aux enjeux colossaux.
À la Ligue contre le cancer, nous savons que nous sommes partis pour des années de combat sur ce sujet.
Crédits photo : Polyclinique La Pergola, Polyclinique Lyon Nord, Clinique Pasteur, Polyclinique du Maine, Clinique Sainte Thérèse, Clinique Ambroise Paré.