Forfait Pathologie Chronique : Création d’une nouvelle modalité de prise en charge de la « Maladie Rénale Chronique »
Un nouveau mode de financement est mis en place pour l’accompagnement pluridisciplinaire, en amont de la suppléance rénale, des patients aux stades IV et V de leur maladie rénale chronique Il s’agit d’un forfait annuel par patient pour financer l’établissement pour le suivi de ces patients, en amont de la suppléance rénale.
Le décret et l’arrêté attendus pour la mise en place au 1er octobre de ce nouveau dispositif sont parus : Leur contenu est intégré en rouge dans cette dépêche qui reprend le contenu et la trame de notre dépêche n° 505 du 17/09/2019 sur le sujet
Dans le cadre du programme « Ma santé 2022 », un accent particulier a été mis sur la prévention et la meilleure prise en charge des pathologies chroniques. L’objectif est d’assurer une prise en charge de meilleure qualité en déployant des actions de prévention, d’éducation du patient et en garantissant une meilleure coordination des soins. La création d’une rémunération sous forme forfaitaire, permettant l’intervention d’une équipe pluridisciplinaire, a été annoncée.
Le Gouvernement a ainsi indiqué qu’un nouveau forfait serait mis en œuvre, dès 2019, pour la prise en charge hospitalière de la maladie rénale chronique. La mise en œuvre pour le diabète est reportée à 2020. Cette démarche a vocation à être étendue à d’autres pathologies et à s’ouvrir par la suite sur la ville et les coordinations ville-hôpital.
Depuis décembre 2018, la FHP MCO et la FHP Dialyse ont suivi de près la construction de cette nouvelle modalité de prise en charge, au fil de nombreuses réunions au Ministère de la Santé.
Pour la maladie rénale chronique (MRC), l’objectif est de permettre l’accompagnement des patients en amont de la suppléance rénale, aux stades IV et V de leur maladie rénale. A cette fin, un nouveau financement est créé : Il ne s’agit pas d’un financement à l’acte ou à l’activité, mais d’un forfait annuel par patient pour financer l’établissement pour le suivi de ces patients, en amont de la suppléance rénale.
Ainsi, le décret n°2019-977 du 23/09/2019 relatif à la rémunération forfaitaire des établissements de santé (ES) pour certaines pathologies chroniques, ainsi que l’arrêté du 25/09/2019 relatif au forfait applicable à la maladie rénale chronique, réglementent cette nouvelle modalité de prise en charge. Une note a aussi été adressée aux ARS pour impulser cette démarche. Enfin, une instruction/circulaire explicative du dispositif ainsi que des notices techniques sur le recueil, le modèle de financement et la facturation sont attendues.
Il convient aussi de noter que l’arrêté comprend 2 annexes, l’une sur la liste des variables à recueillir pour bénéficier du forfait, l’autre sur la liste des actes non techniques inclus dans le périmètre de la rémunération forfaitaire pour la MRC.
Nous vous invitons à prendre connaissance des détails de ces 2 textes, ainsi que des annexes de l’arrêté en consultant les pièces jointes à cette dépêche.
1. Quels patients sont concernés ?
Le forfait concernera les patients adultes atteints de maladie rénale chronique de stade IV et V avec un débit de filtration glomérulaire < 30 ml /mn/1.73m², CKD Epi. La néphro-pédiatrie reste en dehors du forfait.
L’inclusion initiale d’un patient au titre de cette rémunération forfaitaire nécessite deux mesures successives du DFG espacées de 3 mois. En cas de modification substantielle de la valeur du DFG dépassant la valeur mentionnée ci-dessus, le patient peut continuer à bénéficier de cette prise en charge pour une période de 12 mois.
En réunion, la Task Force nous a précisé les éléments suivants :
- Un patient greffé dont la maladie rénale se serait dégradée postérieurement à la greffe (stades 4 ou 5) pourrait bénéficier en cible d’un paiement au suivi lorsque l’équipe réalisant ce suivi est différente de celle assurant le suivi de la greffe
- Le traitement conservateur (hors phase palliative) relève du paiement au suivi
2. Quelles prestations déployer à l’égard du patient ?
L’objectif principal du forfait consiste dans le déploiement d’une équipe pluridisciplinaire autour du patient, là où ; jusqu’à présent dans la majorité des cas, ces patients étaient suivis en consultation de ville par leur néphrologue. Ceci, en escomptant retarder les effets de la maladie et la mise en suppléance (dialyse ou greffe).
Les prises en charge couvertes par ce mode de financement sont :
- Les consultations, y compris les téléconsultations et télé-expertise pour les patients de la file-active, réalisées par le médecin néphrologue ;
- Les forfaits et catégories de prestations mentionnés aux 5o et 6o de l’article R. 162-33-1 ;
- Les interventions et les actes non médicaux réalisés par des professionnels paramédicaux, socio-éducatifs, ou tout autre professionnel mettant en œuvre notamment des actions d’éducation thérapeutique en dehors des programmes labélisés ou des actions d’activité physique adaptée ;
- Les actes médicaux non techniques conformément à la liste fixée en annexe 2 du présent arrêté sur la base de la classification NGAP.
Ce qui n’est pas dans le forfait MRC et reste facturable en sus :
- Pour les ES privés, les consultations des praticiens libéraux (néphrologues ou non)
- La rémunération des médecins salariés (au sens de l’article L162-26-1 CSS)
- Les hospitalisations complètes et de jour
- Les actes relevant de la préparation à la suppléance : pose de fistule, bilan pré-transplantation (sauf consultation néphrologue), entrainement hémodialyse, entrainement DP,
- Les actes médicaux non techniques ne figurant pas sur la liste fixée en annexe 2 de l’arrêté.
- Les actes techniques (CCAM et NaBM) liés à la prise en charge de la pathologie
- Les médicaments de la liste en sus
- Les médicaments figurant sur la liste de rétrocession conformément à l’article L 5126-6 CSP
Pour déclencher le paiement du forfait pour un patient, la réalisation de 3 actions « minimales » est suffisante, à savoir : au moins une consultation de spécialiste et deux contacts avec des paramédicaux (une séance avec IDE et une séance avec diététicien).
L’arrêté, dans son article 9, précise que :
- Dans le cas où le patient n’aura pas eu au moins une consultation néphrologique durant l’année écoulée, il ne percevra aucune rémunération pour la prise en charge de ce patient au titre de cette année.
- Dans le cas où le patient n’aura pas eu au moins une séance avec un IDE pour l’accompagnement du patient à la gestion de sa pathologie, ni une séance avec le diététicien, le montant de la rémunération forfaitaire annuelle perçue pour ce patient est minoré de 33% par condition non respectée.
Lorsqu’un Etablissement de Santé est éligible, il s’engage à mettre en place une équipe pluriprofessionnelle dans un délai d’un an maximum. Un avenant au CPOM de l’ES acte son engagement à la mise en place d’une équipe pluridisciplinaire.
Compte tenu du report de la mise en œuvre de ces forfaits pathologies chronique pour le diabète, aucune information sur le cumul des forfaits n’est indiquée dans l’arrêté MRC
3. Quels établissements peuvent prétendre à cette nouvelle prise en charge et quelles modalités de sélection des établissements ?
Pour être éligible, un établissement de santé doit disposer d’une file active suffisante de patients :
- Pour les années 2019 et 2020, une file active d’au moins 220 patients adultes est nécessaire. Ce nombre de patients est mesuré sur la base des données d’activité de l’année concernée, conformément au périmètre du forfait défini ci-avant.
Pour ces premières années, elle est estimée par l’ES qui transmet l’information à l’ARS. Les ES doivent donc se faire connaitre auprès de leur ARS, s’ils estiment avoir la file active suffisante. - A compter de 2021, le nombre de patients est mesuré sur la base des données d’activité de l’année antérieure, transmises via le système d’information habituel.
Les Établissements de Santé qui ne sont pas éligibles au forfait continuent de facturer leurs prestations comme ils le faisaient jusqu’à présent.
Cet élément ne figure pas dans l’arrêté mais la file active devrait être déterminée au niveau du FINESS juridique de l’ES.
Des dérogations sont prévues :
- Si certains ES n’atteignent pas les seuils, les ARS pourront, à titre exceptionnel, les retenir s’ils permettent de garantir une accessibilité territoriale aux patients. Ces dérogations sont limitées aux ES se trouvant dans les zones du schéma régional de santé non dotées d’autres ES éligibles.
- Le nombre d’ES bénéficiant de la présente dérogation ne peut pas excéder 25% des ES éligibles de la région.
- Ces dérogations peuvent également être octroyées à un Etablissement de santé ayant conclu une convention de coopération organisant le suivi des patients avec un ou plusieurs autres Etablissements de santé, lorsque le nombre de patients pris en charge par ces ES selon le périmètre du forfait (cf. ci-dessus) atteint au total au moins 220 patients.
Seul l’un des Etablissements de Santé peut être déclaré éligible au versement de la rémunération forfaitaire. Les modalités de répartition de cette rémunération sont définies dans la convention de coopération.
Les Etablissements de Santé ayant conclu une convention de coopération ne facturent plus de prestations ni de consultations pour les patients inclus dans le périmètre et pour lesquels ils percevront tout ou partie de la rémunération forfaitaire.
Un arrêté ministériel déterminera la liste des structures sélectionnées pour trois ans. Cette liste sera révisable chaque année pour intégrer de nouveaux ES.
Une file active de 170 patients est envisagé à compter de 2021.
4. Quel est le montant annoncé du forfait ?
Les montants des forfaits sont les suivants :
Secteur | Montant annuel par patient stade 4 | Montant annuel par patient stade 5 |
Secteur ex OQN | 270 € (FMRC4) |
370 € (FMRC5) |
Secteur ex DG | 375 € | 575 € |
L’écart entre les montants public et privé du forfait, s’explique notamment par le fait que le tarif public comprend le montant des consultations néphrologiques.
Pour les années 2019 et 2020, sur la base de la déclaration de l’établissement sur sa file active, une avance sera versée et fera l’objet d’une régularisation au plus tard en mai n+1 sur la base de l’activité effectivement réalisée, mesurée grâce au recueil à mettre en place.
Pour 2019, les forfaits seront versés selon leur valeur en année pleine au titre de l’activité réalisée entre le 1er octobre et le 31 décembre 2019. Autrement dit, pour chaque patient pris en charge, les ES toucheront le forfait plein annuel pour 2019 même si l’activité ne sera réalisée que sur 3 mois. Il s’agit là d’une mesure incitative pour que les ES se lancent dans cette démarche.
Dans un 1er temps, le montant versé aux établissements dépendra donc uniquement du nombre de patients pris en charge. Cependant, à terme, le montant de la rémunération annuelle perçue par les établissements éligibles tiendra compte :
- 1° De l’activité réalisée par l’établissement de santé au titre des prises en charge concernées, qui peut être mesurée notamment par le nombre de patients pris en charge annuellement ;
- 2° Des caractéristiques des patients et, le cas échéant, des prises en charge en fonction de la gradation des soins ;
- 3° Des résultats de l’établissement de santé pour les indicateurs liés à la qualité ;
- 4° Du respect de conditions minimales de prise en charge, mesurées par le nombre et la nature des prestations réalisées.
Les points 2° et 3° nécessitent des travaux complémentaires, et un recueil d’information préalable.
Une garantie de rémunération minimale sera mise en place afin de sécuriser les ressources des établissements. Cette garantie sera mise en place dès 2020 (article 8 de l’arrêté)
5. Quel recueil d’informations ?
Les ES s’inscrivant dans la démarche devront procéder à un nouveau recueil d’information spécifique. Chaque contact avec l’équipe peut faire l’objet d’une collecte de données sur les éléments suivants :
- Données administratives : FINESS géographique et juridique, date de naissance, date de début de prise en charge dans le parcours, …
- Caractéristiques « patient » : stade de la MRC, biologie (DFG, créatinine, protéinurie), pathologies associées/comorbidités, mobilité (classification ABM), …
- Activités : consultation néphrologue, diététicien, assistante sociale, …
- Qualité (process et résultats) : réunion pluri professionnelle, questionnaire patients, …
Les données administratives, caractéristiques « patient » et activité devraient être recueillies dès octobre 2019. Les données relatives à la qualité pourraient seulement être collectées à partir de 2020 (après travaux sur les indicateurs).
Le recueil mis en place est intitulé « résumé de parcours » et devrait être transmis 2 fois par an à l’ATIH. Il pourrait être collecté sur un outil de saisie mis à disposition par l’ATIH ou sur un outil élaboré localement.
Objectif pour 2019 : mise en œuvre au 1er octobre 2019 avec un 1er recueil de données et la mise à disposition d’une 1ère version d’un outil de recueil.
Nous vous invitons à prendre connaissance de l’annexe 1 de cet « arrêté MRC » qui liste les variables à recueillir. Concernant les morbidité et complications, il devrait s’agir d’une liste à cocher. Le détail ne figure pas dans l’arrêté mais vous trouverez ci-dessous à titre indicatif ce qui nous a été présenté :
Liste de complications et comorbidités à cocher :
- Oxygénothérapie ou assistance ventilatoire à domicile
- Troubles du rythme ou de la conduction cardiaque
- Accident ischémique transitoire (AIT)
- Insuffisance respiratoire chronique ou BPCO bronchopneumopathie chronique obstructive
- Accident vasculaire cérébral (AVC)
- Anévrysme de l’aorte abdominale
- Syndrome d’apnée du sommeil
- Artérite des membres inférieurs
- Cancer ou hémopathie évolutif
- Insuffisance coronarienne
- Infarctus du myocarde
- Insuffisance cardiaque
- Séropositivité HIV
- PCR VHC positif
- Ag HBs positif
- Cirrhose
- Diabète
- Tabac
- SIDA
- Autres
6. Quelles évolutions de cette prise en charge par la suite ?
Ce modèle de financement a vocation à évoluer afin de prendre en compte de manière progressive et évolutive les différentes caractéristiques des patients qui peuvent nécessiter des soins et/ou un accompagnement différent, ainsi que l’incitation à l’amélioration de la qualité.
En fonction du recueil des données de l’ES, le montant du forfait pourra ensuite être modulé en fonction de la lourdeur des patients, des prestations proposées et des indicateurs qualité relevés.
- Poursuite des travaux pour 2020/2021 :
– Consolidation des montants des forfaits et ajustements aux caractéristiques patients
– Mise en place d’un recueil d’indicateur qualité dès 2020 et d’une rémunération à la qualité à compter de 2021
N’hésitez pas à nous faire part de votre projet de déploiement de cette activité nouvelle afin que nous vous accompagnions au mieux dans cette démarche.
Vous trouverez ci-joint la liste qui a été élaborée avec les ARS. Cet arrêté sera complété avant la fin de l’année pour une nouvelle liste applicable dès janvier 2020.
Sophie BUSQUET DE CHIVRE (sophie.busquet.mco@fhp.fr), Laure DUBOIS (laure.dubois.mco@fhp.fr ) et Matthieu DERANCOURT (matthieu.derancourt.mco@fhp.fr ) sont à votre disposition pour tout renseignement complémentaire.
Restant à votre écoute
Bien Cordialement
Thierry BECHU
Délégué Général FHP-MCO
A TÉLÉCHARGER :
- Décret n°2019-977 du 23/09/2019 relatif à la rémunération forfaitaire des établissements de santé pour certaines pathologies chroniques
- Arrêté du 25/09/2019 relatif aux forfaits alloués aux établissements de santé dans le cadre de la prise en charge des patients atteints de maladie rénale chronique et ses 2 annexes
- Projet de note aux ARS pour leur demander que les ES se déclarent auprès d’elles
- Liste des établissements retenus