Dr Elisabeth Hubert, présidente de la FNEHAD
Vous venez d’être réélue à la présidence de la FNEHAD. Pourquoi ce nouveau mandat ?
La raison en est simple : il reste encore des étapes essentielles à franchir pour les HAD et plus largement pour la reconnaissance de l’activité et je pense pouvoir encore durant les deux prochaines années aider à satisfaire nos objectifs.
Le premier est le suivi de la mise en œuvre des PRS et les décisions des commissions spécialisées d’organisation des soins (CSOS). Le nouveau droit des autorisations octroie aux établissements HAD, outre la mention socle qui correspond à l’HAD polyvalente, trois nouvelles mentions de spécialités : la rééducation, la prise en charge des enfants de moins de 3 ans et le suivi obstétrique ante et post partum. La FNEHAD sera très attentive aux conditions d’attribution de ces mentions. Par ailleurs, ces compétences complémentaires ne pouvant pas se faire à périmètre financier constant, la question de leur financement se pose et c’est un élément majeur de la réforme plus globale du financement des HAD.
Le second est la mise en œuvre du projet de chimiothérapie injectable en HAD en substitution de l’HDJ, conçu avec Unicancer, mais qui sera ouvert aux établissements de santé spécialisés en oncologie indépendamment du statut. L’idée est que le prescripteur de cette chimio en HAD, mobilisé dans le suivi du patient, soit rétribué. Le différentiel de coût entre HAD et HDJ génère des économies importantes dès le premier patient pris en charge, permettant le paiement de ce forfait pour le prescripteur. Tous les éléments constitutifs sont prêts, les acteurs de santé sont dans les starting blocks mais nous sommes dans l’attente du décret d’application qui, n’ayant pas été jugé urgent, attend son passage en Conseil d’État !
Le dernier projet à court terme relève de l’application de la stratégie décennale de soins palliatifs. La FNEHAD a obtenu que soient instituées des équipes d’intervention rapide en soins palliatifs par l’HAD. À la demande d’un établissement sanitaire, d’un médecin traitant, d’un EHPAD, voire du SAMU, l’équipe dédiée de l’établissement HAD serait en mesure d’intervenir très vite (dans les 2 heures) afin de répondre au domicile à une demande de prise en charge pour un patient dont l’aggravation de l’état de santé justifierait normalement son transfert urgent à l’hôpital, mais qui ne le souhaite pas. Cette prise en charge urgente suppose la mise à disposition H24 d’une équipe soignante complète et des moyens techniques conséquents en appui (véhicule/téléconsultation/outils connectés…).
Tous ces projets seront bien évidemment appelés à être évalués dans l’année qui suivra leur mise en œuvre.
Le financement de l’HAD dépend à 95 % de la T2A. Quelles sont vos attentes au sujet de la réforme du financement ?
Cela fait 14 ans que l’idée d’une réforme du financement de l’HAD est régulièrement évoquée, par le rapport IGAS de 2010, la Cour des comptes dans deux rapports différents la MECSS, la mission Véran en 2017… et depuis nous attendons. Depuis janvier 2023 et la déclaration du président de la République sur la nécessaire réforme du financement des établissements de santé, nous nous inscrivons dans ce débat. Cependant, 95 % de notre activité relevant de la T2A, les modalités d’élaboration des financements autres que la T2A, leurs proportions et le calendrier d’application suscitent de fortes interrogations. Parallèlement, nous travaillons avec l’ATIH, la DGOS, la DSS et la CNAMTS à la révision de la classification des actes de soins, base essentielle de notre guide de codage et donc du calcul de la T2A. Cette classification établie au début des années 2000 doit prendre en compte la mutation des activités de soins de l’HAD.
Plus généralement, le politique doit s’interroger sur la place de l’HAD dans la transformation de l’offre de soins. Si demain on veut réduire le recours à l’hospitalisation avec hébergement, réduire la durée des séjours hospitaliers, fluidifier les sorties des urgences y compris par un retour vers le domicile, le soutien de l’HAD est indispensable et le sujet du financement de l’HAD est majeur.
Comment voudriez-vous voir évoluer la collaboration avec l’hospitalisation privée ?
La collaboration avec les établissements privés se fait en bonne intelligence et en toute confiance. Il ne faut pas oublier qu’un HAD sur 5 est de statut privé commercial. Notre coopération entre fédérations est également très fluide et transparente, la valeur ajoutée de chacune des fédérations étant respectée. Cependant au regard des données du PMSI, nous constatons que le recours à l’HAD par l’hospitalisation privée est en-deçà de ce qu’il devrait être dans certaines filières. Il faut que nous incitions davantage hospitalisation avec hébergement et HAD à travailler ensemble sur le parcours du patient, pour que tous les patients qui le justifient puissent accéder à l’HAD.
Crédit photo : © Pascal Vila.