Alice de Maximy, fondatrice de Femmes de santé & hkind
Vous avez créé le collectif Femmes de santé, à quelle fin ?
Je suis communicante en santé et ma curiosité naturelle et mes expériences internationales m’ont amenée à faire le constat que les femmes qui portent des initiatives, en général, ne se mettent pas assez en avant, et qu’on ne les met pas en avant non plus. Des dysfonctionnements structurels bien ancrés empêchent souvent les femmes de faire carrière et de s’élever. Le secteur de la santé ne fait pas exception, bien au contraire, d’où la création du collectif Femmes de santé.
Il regroupe plus de 2 600 femmes qui exercent une activité dans le secteur de la santé et qui chacune apporte une contribution positive et fait avancer la cause de la femme. Le collectif est une tribune, mais également un lieu où elles peuvent s’engager, partager des solutions et transmettre. On constate des besoins de sensibilisation sur de multiples sujets : l’égalité des genres, le leadership, la santé de la femme, la santé environnementale…
La synergie collective de Femme de santé est productive. Quelles sont vos réalisations ?
Les Femmes de santé m’ont vite fait comprendre que la représentation ne suffisait pas, et qu’il fallait aller beaucoup plus loin pour faire avancer les choses.
J’ai ainsi créé l’organisme de formation certifié Hhind (humankind, formations et conseil, santé, management, égalité). Nos missions auprès des entreprises et établissements de santé ont pour objectif de positionner la santé, l’équité, l’égalité et le management éclairé au cœur des RH et de la RSE. Ce sont les femmes du réseau qui sont formatrices. Nous avons accompagné l’Hôpital Paris Saclay (14 000 salariés) pour l’élaboration de leur plan égalité, qui va servir de projet pilote pour les autres établissements de l’AP-HP. Nous en sommes très fières, en ce que nous avons mené un vrai travail d’analyse des données et sur le terrain.
Par ailleurs, l’activité collaborative et de réflexion du collectif est très dynamique et a abouti à la mise en place d’Etats généraux, et à l’élaboration de documents de synthèse sur la place professionnelle de la femme, sur l’égalité, la santé de la femme et bientôt sur la santé environnementale. Nos ouvrages ont d’ailleurs été repris dans le Plan interministériel pour l’égalité entre les femmes et les hommes 2023-2027.
Et chaque année, nous publions nos « révélations », une mise en lumière sous forme vidéo de femmes exemplaires du monde de la santé, à l’occasion de la journée internationale de la femme, ou encore cette année lors de SantExpo, en présence de plusieurs ministres*.
Quels sont les plus grands freins que rencontrent les femmes dans leur carrière professionnelle ?
La grande question est celle du leadership, qui, quand on est une femme, nous amène à naviguer dans un système traditionnellement conçu et tenu par des hommes. Une femme est d’abord vue comme une femme avant d’être perçue comme une professionnelle. Ensuite, notre culture et notre histoire font que naturellement, les filles s’effacent, sont plus sérieuses… Nous devons œuvrer et manager en prenant compte de tout cela.
Nos formations sont là pour faire avancer les choses de manière pragmatique, former les référents égalité des hôpitaux, permettre de lutter contre les violences sexistes, faciliter la prise de parole, permettre aux RH d’assurer leur rôle de médiateur dans certaines situations…
L’égalité est une obligation réglementaire en entreprise et avoir un plan de prévention du harcèlement sexuel est une obligation légale. Ce n’est pas très vieux ; trop peu de structures mettent en place des actions.
Les violences sexistes et sexuelles en établissement de santé, comment les prendre en charge ?
Nous y travaillons avec les RH à l’aide d’une formation qui rencontre un fort succès, sur le harcèlement moral et sexuel, les remarques sexistes, comment les identifier et les gérer. Cette formation permet d’étudier la question du biais genré et de comprendre la mécanique psychologique d’une remarque sexiste et la différence avec le harcèlement. Dans certains cas, dans un contexte professionnel, la tolérance zéro s’impose, il faut le savoir. La formation est faite par une sexothérapeute et donne les bons outils à tous les salariés qui suivent la formation, soignants ou non.
* Isabelle Rome, Ministre déléguée auprès de la Première ministre, chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes, de la Diversité et de l’Égalité des chances, Agnès Firmin Le Bodo, Ministre déléguée auprès du Ministre de la Santé et de la Prévention, chargée de l’Organisation territoriale et des Professions de santé et Stanislas Guerini, Ministre de la Transformation et de la Fonction Publiques.