Béatrice NOËLLEC, Directrice des relations institutionnelles et de la veille sociétale à la FHP
Que révèle l’enquête FHP/Viavoice auprès de la population française sur la démocratie en santé ?
La démocratie en santé, et plus particulièrement la possibilité de faire entendre leur voix sur les grands enjeux de santé, constituent des enjeux majeurs pour 86 % des Françaises et des Français interrogés. Leur principal grief à l’égard du système de santé tient à sa complexité excessive : absence de visibilité des parcours, démarches administratives pesantes, manque d’informations fiables… Ils aspirent à davantage de simplification et de transparence. Comme les acteurs de santé d’ailleurs… Ils estiment à juste titre qu’écouter leur expérience peut améliorer les choses, sur le plan individuel comme collectif. 82 % souhaitent d’ailleurs que les patients soient davantage représentés dans les lieux de décision en santé, afin que la démocratie territoriale de santé soit vivante et puisse inclure tous les acteurs. Là encore, nous demandons la même chose en tant qu’acteurs de santé !
Paradoxalement, même si l’aspiration à une participation accrue est forte, on constate une très forte méconnaissance du concept et des rouages même de la démocratie sanitaire. Vingt ans après une loi fondatrice, la loi Kouchner, c’est un constat qui interroge, et qui a des impacts sur la reconnaissance même des acteurs de cette démocratie, comme les représentants des usagères et usagers. Pendant la crise sanitaire, ils ont parfois été latéralisés. Les leçons doivent en être tirées, pour prendre en compte les patients comme partie prenante à part entière – et pas seulement ceux à qui on pense quand on a coché toutes les autres cases -, et pour coconstruire avec eux sur les enjeux de sécurité, d’accessibilité, de qualité, de pertinence.
Et que disent les établissements de soins privés adhérents à la FHP ?
Notre enquête auprès des hôpitaux et cliniques privés à missions a permis d’objectiver la belle dynamique de la démocratie sanitaire en leur sein. 68 % ont défini une politique dédiée en faveur de la participation des patientes et des patients, 71 % affirment que les enjeux de démocratie sanitaire font partie intégrante de la stratégie globale de leur établissement, et 88 % considèrent que les recommandations de la commission des Usagers contribuent à l’amélioration de la qualité des prises en charge. Tout n’est pas toujours facile : trouver des représentants des usagers est complexe pour un établissement sur deux (ce qui n’est pas surprenant, au regard du degré de méconnaissance de la population sur ces enjeux !) et e-Satis est jugé trop complexe et inadapté à certains publics.
Tout l’enjeu aujourd’hui est d’assurer la transition entre la « représentation », ADN de la loi Kouchner, et la « participation » active des patients à la transformation du système. 59 % des établissements ont déjà engagé des démarches de mesure de l’expérience patient, et 58 % déclarent associer les patients à l’amélioration de la qualité, pertinence des soins et gestion des risques.
Et puis l’enquête montre aussi des établissements « ouverts sur cité » ; relations avec le monde associatif, actions dans le domaine social et environnemental… L’opération « Ma clinique est fantastique » par exemple vise à mieux faire connaître aux jeunes les métiers du soin. C’est cela aussi, les hôpitaux et cliniques privés « à missions » !
Qu’entreprend la FHP pour soutenir les cliniques et hôpitaux privés ?
Ces deux enquêtes soulignent l’importance de ces enjeux pour les citoyens et pour les acteurs de santé, à l’heure où le Conseil National de la Refondation en santé appelle une approche plus participative pour transformer le système, en valorisant les initiatives des territoires qui s’appuient sur les besoins, et plus uniquement sur l’offre, et privilégient les logiques de coopérations. Nous devons être vigilants collectivement à ce que ce ne soit pas un vœu pieux, car les inquiétudes sont grandes de tous côtés sur la pérennité du système.
Au sein de la FHP, nous nous efforçons de développer des relations partenariales avec le monde de la démocratie sanitaire, de contribuer aux débats (dans le cadre du groupe « droits de usagers » de la Conférence nationale de santé par exemple). Il y a aussi notre Fondation des usagers du système de santé, présidée par Jean Léonetti, qui récompense des projets exemplaires élaborés plus seulement « pour » mais « avec » les patients. Et puis, émanation de notre Groupe stratégique, nous avons créé un groupe de travail dédié sur le sujet, et les résultats de notre enquête vont nous permettre de travailler à des recommandations concrètes pour toujours mieux accompagner les adhérents sur ces enjeux. Avec comme principe, pour paraphraser une phrase célèbre : « ce que tu fais pour moi, fais-le avec moi ! »