Dr Antoine Lacaille, président du Centre d’Autodialyse Jean Mermoz à Drancy (93) et néphrologue à l’Hôpital Privé de l’Est Parisien à Aulnay-sous-Bois (93)
Vos établissements ont été dans les premiers en Île-de-France à vacciner leurs patients dialysés, comment cela s’est-il passé ?
Le Centre d’Autodialyse Jean Mermoz (indépendant) et la Clinique de l’Hôpital Privé de l’Est Parisien (Ramsay Santé) font partie des plus importantes structures de dialyse en Île-de-France (250 patients en dialyse en centre et 100 hors centre), aussi permettre à cette population fragile de se faire vacciner rapidement et en toute sécurité a été une priorité pour nous. Le 93 est l’un des départements les plus touchés par cette pandémie et 25 % de nos patients ont été testés positifs à la Covid-19 cette année, malgré des mesures sanitaires strictes mises en place dès février 2020. Nous avons démarré la vaccination dès la 2e semaine de janvier et en l’espace d’une semaine tous nos patients éligibles et volontaires ont reçu leur première injection, puis sont venus les retardataires. Nous avons inoculé la 2e dose la première semaine de février. Nous avons pu en parallèle assurer la vaccination de nos personnels éligibles. Avec une adhésion globale de 75 % parmi les patients éligibles à la vaccination et une majorité du personnel soignant de plus de 50 ans, je dirais que c’est déjà un bon résultat.
Diriez-vous que cette campagne de vaccination a été simple à mener ?
Cette fluidité dans le process a demandé une bonne organisation en amont et de l’anticipation. Dès l’annonce de la campagne, notre pharmacien et les directeurs des deux établissements ont pris contact avec le centre hospitalier pivot, responsable de la distribution des vaccins. Ensuite nous avons rapidement fourni des listes précises de patients et les pharmaciens ont assuré la coordination avec les équipes en charge de la vaccination.
Le plus compliqué a été la procédure de consentement des patients, informés personnellement, l’un après l’autre. Finalement, nous avons fait le choix d’expliquer en détail et oralement les points du consentement et avons le cas échéant contacté les familles pour les patients dépendants ou lorsque nous rencontrions des barrières de langue. Tout est noté dans le dossier médical, la traçabilité est garantie. Nous avons lancé la phase administrative dès début janvier, avant même de savoir que nous pouvions bénéficier des doses, afin d’être prêts le jour J. Ensuite, en termes de fourniture de vaccins, notre centre pivot a réagi très vite et a assuré la 2e dose, si bien que nous n’avons pas rencontré de problème d’approvisionnement, ni aucun décalage de rendez-vous pour nos patients dialysés prioritaires.
Un frein est le manque d’adhésion du personnel soignant et infirmier. Les retours de mes confrères de l’hôpital public sont similaires. La majorité de nos personnels sont jeunes, de moins de 50 ans, aussi, il a fallu bien leur expliquer l’intérêt de la vaccination pour nos patients, afin d’éviter de développer des formes graves de la maladie.
Certains patients dialysés en centre ont dû se rendre dans un centre de vaccination pour recevoir leur vaccin, que cela vous inspire-t-il ?
Pour moi, il n’était pas question que des patients dialysés chez nous aillent se faire vacciner ailleurs. Quand vous êtes en dialyse, vous bénéficiez de la sécurité et du confort apportés par le personnel soignant et l’équipe médicale.
Les constats de la Société française de néphrologie sont clairs, on observe une sur-mortalité importante liée à la Covid parmi les patients insuffisants rénaux dialysés, mais aussi ceux transplantés et les insuffisants rénaux à un stade évolué. La vaccination pour ces derniers ne se fait pas au sein de l’établissement, mais sur rendez-vous et avec une prescription, dans un centre de vaccination externe. Heureusement, la majorité de nos patients porteurs d’une IRC Stade IV et V se sont vu proposer la vaccination.