L’application Heal, aussi appelée « Uber des médecins », rencontre un franc succès à Los Angeles. En peu de temps, la plateforme met en relation le patient et le médecin, qui est disponible de jour comme de nuit. La concurrence traditionnelle est délaissée au profit de cette nouvelle forme de médecine. Avec la multiplication de ces applications médicales, n’est-on pas en train d’assister à une dérégulation du monde de la santé et d’une désincarnation de la médecine traditionnelle ? Cette dernière tend-elle à devenir caduque, à s’ « ubériser » ?
Quand la sphère marchande s’immisce dans le diagnostic médical
A n’en pas douter, le digital remet en cause les métiers de la santé. Si certains partisans vantent les qualités des fonctionnalités des objets connectés, d’autres sont réticents à intégrer ces pratiques. Le débat est d’autant plus animé que le secteur marchand vient « concurrencer » le médical. En effet, un site Internet, deuxiemeavis.fr , propose de donner en ligne un second avis d’expert de santé. Facturé à 295 euros, cette prestation n’est pas remboursée par la Sécurité Sociale et fait du tort aux cabinets traditionnels.
Les experts du site analysent le dossier du patient, préalablement téléchargé par ce dernier, et donnent un diagnostic sous quatre à sept jours. Une pratique qui indigne bon nombre de médecins et qui va à l’encontre du récent rapport de mission du CNOM (1), qui rappelle que « la médecine ne peut pas être pratiquée comme un commerce et que toute forme de publicité directe ou indirecte pour un médecin est interdite.» Certaines fédérations de professionnels de santé parlent d’ores-et-déjà d’ « ubérisation » de la médecine.
Les médecins à l’ère du Big Data
« La santé sera l’un des derniers secteurs à être balayés par le numérique, car il est très réglementé. Mais la révolution à venir sera très violente ». Les propos du fondateur de Doctissimo, Laurent Alexandre, mettent en lumière l’inévitabilité de ce constat. Les objets connectés et applications vont rassembler un nombre de données gigantesque et difficile à contenir. Cela va accélérer tous les processus de recherche scientifique et aboutir sur une multitude de découvertes radicales. Mais la gestion de ce nouveau flux de données sera impossible à traiter avec les connaissances actuelles.
Bien que les enjeux soient de taille, 70% des médecins indiquent la nécessité d’intégrer progressivement le numérique dans leurs pratiques médicales, sans dénaturer leur métier ni être laissé de côté. Or la tendance se porte sur des offres médicales offertes par des tiers commerciaux, et fait concurrence aux professionnels de santé. Les médecins doivent banaliser ces nouvelles pratiques, se les approprier et fixer les responsabilités encourues par les sociétés commerciales qui tentent d’ « ubériser » la santé.
(1) http://unhpc.org/pdf/CNOM_uberisation_de_la_sante.pdf
http://www.pourquoidocteur.fr/Articles/Question-d-actu/13355-Deuxieme-avis-medical-vers-une-uberisation-de-la-sante
http://www.lalettredegalilee.fr/luberisation-de-la-sante-est-en-marche/
http://unhpc.org/pdf/CNOM_uberisation_de_la_sante.pdf