Vous êtes désormais président en titre de la FHP Nord-Pas-de-Calais Picardie, quels sont vos premières actions ?
J’étais déjà président depuis un an car j’ai succédé à Denis de Frémont en cours de mandat. Depuis mon élection début mars, j’ai poursuivi les contacts avec les élus régionaux, les directeurs de l’ARS et des principaux hôpitaux car je considère que la relation personnelle est primordiale. Je connaissais déjà bien les hospitaliers au travers de deux GCS, et cette connaissance est importante car la loi sur les GHT déterminera le paysage sanitaire futur. L’ARS est préoccupée par la création des GHT et le fait de faire cohabiter les 33 CH du Nord-Pas-de-Calais, les CH de Picardie, le CHU de Lille et désormais le CHU d’Amiens qui connaît un déficit abyssal de 18 millions d’euros cette année. L’objectif avoué et répété de nos élus est de maintenir les hôpitaux à flot tout en serrant leurs budgets mais il n’est pas d’accompagner les cliniques privées. Même s’il est difficile localement de les rendre responsables de la campagne tarifaire catastrophique, il ne faut attendre de leur part aucune compassion particulière sur les situations très délicates de certains de nos établissements.
Quel serait votre « bravo » ou votre coup de gueule ?
Je noterai notre satisfaction récente d’avoir eu à notre AG de la FHP, la visite de Xavier Bertrand, le nouveau président de région et de Monique Ryo, vice-présidente en charge de la santé, mais aussi d’autres élus venus nous encourager. Même si leurs paroles bienveillantes à notre encontre ne les engagent que peu finalement, leur présence nous a fait du bien au moral. Xavier Bertrand d’ailleurs s’est engagé à abroger la loi de santé si son parti revenait au pouvoir en 2017.
Mais surtout, je voudrais pointer l’extrême professionnalisation de notre secteur et de nos établissements, reconnue d’ailleurs par l’ARS. Nos cliniques savent recruter des cadres diplômés, talentueux, qui placent nos praticiens dans les meilleures conditions d’exercice possibles. Leurs actions nous permettent aujourd’hui d’éviter le pire et d’espérer.
A contrario, je suis surpris du manque de professionnalisme dans la gestion de certains hôpitaux où je constate un faible niveau de formation et de compétences. Certains postes de direction sont occupés à l’ancienneté, alors qu’un haut niveau de compétences est nécessaire pour gérer de telles structures géantes, comptant parfois plusieurs milliers de salariés. Il n’est pas étonnant de voir de tels gouffres financiers publics dans des établissements, qui, ayant eu la tête plus grosse que le ventre, se sont endettés au-delà du raisonnable afin de s’équiper « en tout et de tout ». Sans parler d’élus régionaux de l’ancienne majorité, en charge de la santé qui ont dépensé des millions au bénéfice d’acteurs publics, sans connaissance réelle du secteur et surtout sans contrôle.
Nous avons un atout majeur : l’intelligence de la gestion et la vision à moyen et long terme des nécessaires regroupements entre nos structures !
L’hôpital va découvrir les GHT et nous disposons encore d’un peu d’avance sur ceux qui s’occuperont encore dans les prochaines années à se disputer le leadership de tel ou tel GHT. Car certains vont disparaître et le CHU ne fera plus de cadeau.
Profitons de cette avance avec intelligence à condition bien sûr que nous disposions encore des ressources nécessaires pour survivre dans de bonnes conditions, et avant que les dirigeants d’établissements publics ne s’inscrivent dans une démarche entrepreneuriale de qualité.
Quelle est la faiblesse de votre territoire que vous noteriez ?
La pénurie des médecins ! Bien que nombreux en métropole lilloise, certains territoires sont en situation catastrophique (Sambre, Avesnois, Thiérache mais aussi de larges territoires proches du littoral et de la Picardie). Si dans le sud de la France, une compétition existe entre les médecins, ici, il y a du travail pour tous, mais il n’est pas toujours bien réparti.
Nos établissements de santé privés SSR, psy, MCO sont de qualité et bien gérés. Nous faisons de notre mieux mais nous manquons tout simplement de bras pour nous adapter à une population en grande demande de soins et dont l’indice de précarité et de surmortalité est très élevé.
Certaines zones sont donc moins attractives pour l’installation de jeunes médecins et ce, d’autant que la Faculté de médecine de Lille nous refuse pour des raisons dogmatiques, des terrains de stage pour les jeunes internes, qui pourtant pourraient trouver dans nos établissements un tutorat très formateur.
Disposer de seulement trois services d’urgence, sur les 30 régionaux, est dommage car les urgences hospitalières sont encombrées et 50 % de la population choisissent nos établissements pour se faire opérer.
Nos tarifs malheureusement en constante régression, nous obligent à nous regrouper. D’une manière générale, je suis inquiet pour notre secteur qui, à force de restructurations, pourrait connaître des mouvements sociaux graves.