Paul Garassus, docteur en Médecine et Economiste, Neurologue de formation et d’exercice libéral. Il est également Président du Conseil Scientifique du BAQIMEHP (Bureau d’Assurance Qualité et de l’Information Médico-Economique de l’Hospitalisation Privée) et responsable des Affaires internationales à la SFES (Société française d’économie de la santé).
Le financement de la santé est-il durable?
Tous les acteurs de la santé, publics comme privés et toutes leurs parties prenantes doivent se poser la question de la soutenabilité. Le financement de la sécurité sociale pénalise-t-il l’économie, l’expose-t-il à des défis insurmontables, est-on capable de maintenir aujourd’hui notre système de financement de la santé? Partout en Europe, on le voit, les systèmes de santé commencent à se fissurer, c’est le cas dans les pays du sud Grèce, Italie, Espagne, Portugal mais aussi en Irlande… Ces pays ont dors et déjà des retards de paiement. Il est temps de s’interroger : notre modèle est-il durable ?
Le panier de soins français apparait comme bien garni dans les comparaisons européennes mais pour la première fois depuis 2010, la croissance des dépenses de santé a été encore inférieure à l’évolution du PIB. Nous sommes dans un environnement contraint : il est probable que des ajustements aient lieux ces prochaines années dans les prises en charge, et c’est pour cela qu’il est essentiel de prendre des décisions éclairées. Même si ces sujets sont très techniques et absents des débats sociétaux actuels.
Comment mieux définir des stratégies de santé ?
Il est nécessaire de mieux évaluer les stratégies de santé, pour proposer les plus efficientes. Nous sommes à la recherche de nouveaux modèles, pour être au plus près des besoins de la population et choisir les technologies médicales nécessaires. Dans le monde anglo-saxon, on appelle cela l’Health Technology Assessment. Le champ de l’analyse politique doit prendre en compte les implications médicales, mais aussi économiques, sociales et éthiques des changements technologiques. Les stratégies de santé seront nécessairement multimodales. Les simulations doivent se baser sur nos connaissances des systèmes complexes, où chaque acteur a un point de vue : l’assurance maladie, les praticiens, les patients, les mutuelles, l’industrie, la recherche… Apprenons à utiliser les bases de données complexes pour fournir une photographie réaliste des besoins et redéfinir le financement. Le médical certes, mais aussi l’économique, le sociologique, sont à inclure pour optimiser les solutions dédiées à la protection et aux soins. Les indicateurs qualité doivent y contribuer et être inclus de façon pragmatique. Il faut donc être observationnel au départ, modéliser et ensuite proposer une stratégie opérationnelle intégrant au mieux les différents éléments analysés.
A quoi ressemblera la médecine du futur?
Aujourd’hui, nous sommes à l’aube d’un changement de paradigme. Nous avons déterminé, pour toute une série de pathologies, des facteurs liés au mode de vie comme pour le diabète et l’obésité, mais aussi des facteurs génétiques, des causes environnementales, etc. La médecine du futur sera forcément prédictive. Elle sera également personnalisée : l’e-santé prendra en compte les facteurs de risques, et l’éducation thérapeutique sera une partie incontournable de la santé. Les plateaux techniques seront moins nombreux, bien équipés et travaillant en réseaux. Il faut avoir d’emblée une volonté globale. Aujourd’hui, l’Europe, c’est 268 régions, où les acteurs de la santé ont partout des expériences riches… Il est essentiel de les valoriser !