19,5 milliards. Non, c’est n’est pas le montant du déficit de la sécurité sociale allemande, mais bien celui de l’excédent qu’ont dégagé les caisses d’assurance maladie outre-rhin. Doit-il être redistribué aux différentes caisses? Investi et conservé pour des périodes moins fastes? Alloué à la recherche ? Le ministère de la Santé allemand a de bien gros soucis… mais solvabiliser la santé n’en fait plus partie. Rencontre avec sa porte-parole, Suzanne Wackers, qui raconte les étapes d’un assainissement budgétaire… jusqu’à l’excédent.
Ministère de la santé, Berlin
« Aujourd’hui, en 2012, les Caisses d’assurance maladie allemandes affichent un excédent de 19,5 milliard d’euros. Mais cela n’a pas toujours été le cas. En 2003, en Allemagne, le système d’assurance maladie était malade. Nous affichions un déficit de 8 milliards d’euros. La situation était grave, d’autant que, comme dans les autres pays européens, la population allemande vit de plus en plus longtemps et les soins sont de plus en plus techniques. Il était temps de lancer un grand chantier de rénovation du financement de la santé.
Nous avons commencé par mettre en place un Fonds Santé, par lequel transite l’argent des caisses d’assurances maladie. En Allemagne, nous avons aujourd’hui 146 caisses d’assurance maladie différentes, et auparavant elles étaient plus de 1 000 ! Chacune de ces caisses pouvait fixer librement le montant des cotisations qu’elles demandaient à la fois aux employeurs et aux employés. Cette situation n’était pas juste : certaines caisses avaient plus de patients gravement malades et plus de personnes âgées : elles étaient obligées d’augmenter le montant de leurs cotisations. D’autres avaient majoritairement des patients jeunes et en bonne santé parmis leurs assurés, elles pouvaient se contenter de cotisations basses. En créant le Fonds santé, le ministère a aboli ce système en 2007 pendant la grande coalition (NDLR : Coalition noire, route, SPD/ CDU, soit les socialistes, le parti de Gehrard Schröder et les chrétiens démocrates, le parti d’Angela Merkel). Les caisses ont du toutes réclamer la même cotisation, soit 15,5 % à répartir entre employeur et employés. Autre point délicat : les soins dentaires. En passe d’être déconventionnés, nous les avons intégrés à la charge des employés. L’employeur paye, 7,3% de ses charges et l’employé 8.2% (la moitié de 15,5 plus 0,9 pour les soins dentaires) Ces tarifs sont fixes et l’argent est versé au Fonds santé, également alimenté par une partie des impôts. Le Fonds santé redistribue l’argent aux caisses en fonction de la sociologie de leurs patients. Cela a été assez révolutionnaire à mettre en place : au départ, les caisses ont mener un grand travail de recensement de leurs actes et de leurs patients. Aujourd’hui, le système fonctionne bien, car les caisses peuvent avoir ainsi une comptabilité analytique.
L’Allemagne était le seul pays du monde dans lequel l’industrie pharmaceutique fixait elle même le prix de ses innovations, qui étaient automatiquement remboursées par la Sécurité sociale. Nous avons imposé un plafond. Depuis 2004, nous avons également instauré une taxe de dix euros tous les quatre mois payable par les patients dans les cabinets de médecine de ville. (Cette taxe est responsable de 1,5 à 2 des milliards excédentaires). Nous avons également mis en place une stratégie de prévention : les examens préventifs sont fortement encouragés, et une mammographie est proposée à toutes les femmes de plus de 50 ans. La prévention est notre futur grand chantier ! »