Deux notions interviennent dans la gestion des flux des services d’urgences : la gestion des patients sur place, mais aussi la régulation médicale. Comment faire face à l’affluence ? Faut-il désengorger les urgences ?
« C’est une fausse bonne idée », affirme Marc Giroud, médecin urgentiste et président de Samu-Urgences de France. « Il y a des patients moins graves que d’autres qui se rendent dans des services d’urgences. Mais ce ne sont pas eux qui nécessitent le plus de ressources. Chaque prise en charge requiert des moyens différents, et dix patients ne représentent pas nécessairement dix fois la charge d’un seul patient. »
Marc Giroud souhaite également qu’on ne stigmatise pas, et qu’on ne culpabilise pas les usagers : « Nous sommes dans une société qui évolue vers plus de sécurité, nous devons donc suivre cette évolution. On ne peut pas inciter les personnes à ne pas solliciter les services d’urgences ; cela constituerait dans de nombreux cas une perte de chance. »
Enfin, compliquer l’accès aux services d’urgences créerait, pour les patients, des difficultés sans solution : « Certaines personnes se déplacent aux urgences car elles n’ont pas d’autre choix, parce qu’elle ne trouvent pas de médecin… surtout s’agissant de personnes socialement défavorisées. Les services d’urgences facilitent donc l’accès aux soins pour tous ».
« Nous avons en France un système original qui consiste à recevoir les appels des patients dans un centre de régulation médicale de toutes les urgences : le 15″. De nombreuses campagnes sanitaires invitent en effet à composer ce numéro en cas de douleur cardiaque, d’AVC, d’infarctus, d’accident… »
Ce service ouvert à tous fait face chaque année à près de 12 millions de cas, des plus lourds aux plus légers. Parfois, un simple échange téléphonique entre le patient et le médecin régulateur suffit à rassurer le demandeur et lui indiquer ce qu’il faut faire ; un suivi téléphonique peut être mis en place si l’urgence n’est pas avérée mais qu’une observation est nécessaire ; et l’appel peut parfois se conclure par une prise en charge immédiate. « Ce système de régulation médicale permet de garantir une prise en charge adaptée, le juste soin, tout en utilisant au mieux les ressources », rappelle Marc Giroud, « Un patient en France ne se rend pas forcément compte que le circuit qui lui est tracé par le médecin régulateur est très bien conçu et optimisé. Nous avons des prises en charge extrêmement efficaces par rapport à d’autres pays, avec notamment un accès direct à la structure appropriée au sein de chaque filière spécialisée. »
La régulation médicale permet de mieux traiter les pathologies lourdes. Elle a en réalité moins d’impact sur la gestion des pathologies légères, pour lesquelles les patients viennent souvent directement à la clinique ou à l’hôpital : « La régulation médicale ne fait pas office de filtre protecteur ou de standard d’un service d’urgences. Le rôle de ce service médical téléphonique est de conseiller, de rassurer ou de confirmer la nécessité de se déplacer chez un médecin. Mais, chacun doit pouvoir être accueilli dans un service d’urgences. Cela contribue à rassurer, mais aussi à sécuriser la prise en charge dans chaque situation, lourde ou incertaine », souligne-t-il.