3 questions à Bernard Cabelguen

Bernard Cabelguen est Directeur de la Polyclinique de Rance à Dinan (22)


Deux ans après le rapprochement de votre clinique avec le centre hospitalier de Dinan, quelles conclusions en tirez-vous, est-ce un mariage d’amour ou de raison ?

Ce n’est ni un mariage d’amour, ni de raison, ni blanc, c’est plutôt un mariage interculturel arrangé. Ce projet nous a été imposé par notre ex-ARH il y a quelques années pour venir en aide au Centre hospitalier qui souffrait de désaffection de praticiens en chirurgie et permettre à Dinan de conserver une maternité ainsi qu’une offre chirurgicale de qualité. Nous étions au départ deux dans le lit conjugal, nous sommes désormais trois puisque la Communauté Hospitalière de Territoire, pilotée par le CH de Saint-Malo, qui est en difficulté financière et dont le directeur adjoint est aussi le directeur du CH de Dinan, tend à absorber l’activité de ce dernier. Cela revient à déshabiller Dinan pour habiller Saint-Malo ! Les raisons initiales de notre union de 2009 ne sont plus très valables deux ans après. Toutefois, la procédure de divorce n’est pas entamée.

Quelles sont les avantages pour les deux parties ?
La clinique était située au centre ville, dans des bâtiments anciens, aussi, nous aurions été contraints à un moment donné d’en construire de nouveaux. Nous avons donc accepté de déménager sur le site de l’hôpital et bénéficié de locaux neufs à loyer modéré. Sur ce point, nous sommes gagnants car ce projet nous a évité de contracter des crédits bail sur 15 ans, lourds pour une petite structure comme la nôtre. Cependant, nous avons dû nous engager sur 50 ans, ce qui est une longue période en termes d’investissement pour un établissement privé. Globalement, nous avons amélioré la qualité de l’hôtellerie ainsi que le confort des patients et des personnels. Nous assurons, au côté de l’hôpital, les urgences chirurgicales, et nos équipes de chirurgiens sont d’astreinte 24h/24. De ce point de vue et surtout pour les activités urgences et obstétrique, nous tirons mutuellement profit de notre union. L’hôpital n’aurait pas pu seul conserver de manière pérenne ses autorisations pour ces deux activités.

Quelles sont les limites d’un tel rapprochement ?
Nous avons des cultures de management très différentes, la notion de coût étant plus forte dans le privé, bien que l’hôpital y vienne aussi aujourd’hui. Nous n’avons également pas la même notion du temps et c’est une vraie contrainte au quotidien. La prise en charge aux urgences de l’hôpital est longue et contraint fréquemment nos équipes de chirurgiens à opérer en soirée, ce qui génère des coûts supplémentaires. D’autre part, les modalités de prises de décisions sont lourdes, avec des appels d’offres permanents et des projets qui, au fil des décisions administratives, n’aboutissent pas alors qu’ils étaient quasi signés. Chacune des deux parties s’accroche à sa culture d’entreprise. Composer avec tous les acteurs dans ces conditions requiert une grande flexibilité.