CHRISTIAN SAOUT, président du CISS, Collectif inter associatif pour la santé
Quelles sont à votre avis les «grosses» inégalités de santé ? Comment devrait évoluer notre système ?
Il faut distinguer les causes sociales et les facteurs organisationnels générateurs d’inégalités de santé, autant les uns que les autres. Ainsi, de nombreux travaux de recherche démontrent que les différences de mortalité et de morbidité tiennent incontestablement aux situations socio-économiques des personnes. L’existence de ces disparités est notamment liée au fait qu’on cherche souvent à agir sur leurs effets au lieu de prévenir l’exposition aux facteurs de risques. Plus grave, ces inégalités persistent et s’aggravent en l’absence d’action transversale pour un meilleur accompagnement des populations isolées, vulnérables et mal informées. Ainsi, selon l’Observatoire des inégalités, les inégalités d’espérance de vie augmentent : « l’espérance de vie à 35 ans des cadres sans problèmes sensoriels et physiques est de 34 ans, contre 24 chez les ouvriers, soit un écart de 10 ans. […]. » Au-delà de la « course à la doyenneté », nous devons donc nous pencher en France sur la résolution des inégalités sociales de santé. Les moyens existent, ils sont multiples et reposent sur des acteurs dont le travail mérite d’être mieux coordonné, piloté de manière unifiée et plus démocratique. En ce sens, la lutte contre les inégalités sociales de santé doit maintenant reposer sur les repérages que feront les Conférences Régionales de Santé et de l’Autonomie et recevoir les moyens adaptés, qu’il s’agisse de promouvoir les actions en direction des populations fragilisées ou de développer des programmes au cœur des cadres de vie comme le travail, l’école, les lieux de vie. Par ailleurs, s’agissant cette fois-ci de l’organisation, notre système de santé fabrique, de manière endogène, des inégalités ; notamment parce que l’accès aux soins se complique gravement tant en raison d’obstacles financiers que de la mauvaise répartition géographique des offreurs de soins. Le réseau des 26 ARS a précisément pour mission d’orchestrer l’offre de soins en régulant, en orientant et en organisant les services de santé afin de répondre aux besoins en soins. Le CISS veillera à ce que cette nouvelle organisation se penche en priorité sur les inégalités de santé, en particulier celles dues aux difficultés d’accès aux soins du fait de la pratique des dépassements d’honoraires et de l’absence d’offre de soins dans certains territoires.
La loi HPST prévoit plusieurs évolutions importantes au niveau de l’offre de soins des établissements de santé. Tout d’abord, elle fait évoluer leurs missions. Aujourd’hui, les hôpitaux publics assument l’intégralité des missions de service public (prise en charge des patients en situation précaire, permanence des soins, formation des professionnels de santé…). Cette exclusivité ne permettant pas de couvrir les besoins sur tout le territoire, les ARS auront à identifier les besoins en missions de service public, ainsi que les établissements attributaires … publics au premier chef mais également privés, dès lors qu’ils s’engagent à apporter les garanties nécessaires. Dans cette optique, la loi prévoit d’améliorer les coopérations territoriales entre établissements et professionnels de santé selon deux modalités : la communauté hospitalière de territoire afin de développer les stratégies de groupe entre établissements publics de santé, et le groupement de coopération sanitaire dédié au partenariat public / privé. Ces outils de coopération doivent permettre aux établissements d’améliorer leur efficience et la qualité de leurs pratiques, en mutualisant leurs moyens, comme par exemple les plateaux techniques. Nous y serons attentifs.